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parents et la mienne ne sera pas près de la leur. D’autres destinées, d’autres devoirs ont fixé ma place ailleurs. » En mai 1829, le régiment est de nouveau envoyé à Paris.

Ce ne fut pas sans une bien vive et parfaite satisfaction que je me vis établi à Paris pour une bonne année au moins. Je commençais à me fatiguer des voyages et à m’ennuyer des routes, et puis je voyais la possibilité de conduire ma femme à Paris après la saison des eaux qu’elle devait aller prendre en été. C’était pour nous deux une joie d’enfant de lui faire visiter ce beau Paris qu’elle désirait tant connaître.


CHARLES X

Le 31 mai, je me rendis à Saint-Cloud, avec tous les officiers supérieurs pour faire notre cour au Roi et à la famille royale. Présentés d’abord à Madame la Dauphine par le colonel, nous le fûmes ensuite à Monseigneur le Dauphin qui, en entendant prononcer mon nom, se rappela m’avoir proposé pour chef de bataillon deux ans auparavant et m’adressa la parole. Je ne m’attendais pas à tant d’honneur. Réunis ensuite dans la grande galerie du palais pour attendre le Roi, nous y restâmes pour entendre la messe, ou plutôt pour causer, n’ayant pu pénétrer dans la chapelle qui est peu spacieuse. Après la messe, le Roi se promena longtemps dans la galerie, adressant la parole à tous ceux qui lui présentaient leurs hommages, avec beaucoup de grâce et d’aménité. Cette présentation me fit grand plaisir, car depuis longtemps je n’avais vu autant de dignitaires, ou de personnages célèbres. C’étaient les ministres, les maréchaux, des pairs, des députés, des ambassadeurs, des généraux. Les courtisans étaient nombreux, l’assemblée éclatante da broderies, de plaques, de cordons, de diamants. Dans cette belle galerie, on était mêlé, confondu, chacun jouant son rôle, guettent un regard du maître, et cherchant à l’approcher le plus près, pour se faire voir ou demander quelque faveur. Placé dans un des angles, hors du tourbillon des grands et des admirateurs passionnés de la puissance souveraine, je pus observer à loisir ce magnifique ensemble des grandeurs du jour, chercher à connaître tous ces illustres personnages et me faire une idée de l’éclat des cours. Je ne vis rien de grand ni de distingué dont les manières du Dur d’Angoulême, rien de bon dans les