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parce qu’elle avait déjà consacré Jacques Bénigne à la Vierge [1]. La mère de Bossuet est inexistante en l’histoire.

Inconnues aussi et non moins indevinables, ces « sœurs » chez qui Sainte-Beuve estime que l’on peut « identifier si souvent le même jet et la même sève » que chez le frère éminent « et retrouver son fond à l’état simple. » Anne, l’ainée de tous les enfants, mourut toute jeune. Marie, ainée de Bossuet de cinq ans, Madeleine et Marguerite, ses cadettes de trois et de sept ans, survécurent. Les deux premières faillirent vieillir dans le célibat. Marie, vers 1660, épousa Isaac de Chasot, magistrat, Bourguignon d’origine, mais établi, comme les Bretaigne et les Bossuet, au pays messin. L’autre, Madeleine, filleule de Mgr Zamet, évêque de Langres, devint la femme de Joseph Foucault, secrétaire des Conseils d’Etat. La dernière, Marguerite, après avoir été élevée au couvent des Dominicaines de Toul, y entra comme religieuse.

Encore qu’il n’y eût, à prendre le voile, que l’une des trois sœurs, elles furent toutes les trois dévotes, on le peut croire, mais sans preuves, si ce n’est, en ce qui concerne Marguerite, la dominicaine, un petit geste héroïque : « A quatorze ans, comme ses supérieures hésitaient à la recevoir à profession parce qu’elle relevait à peine d’une grave maladie, elle coupa elle-même ses cheveux » pour affirmer son irrévocable désir. Quant à Mme Foucault, ce n’est qu’à l’époque où elle disparait, âgée de soixante-quatorze ans, que Le Dieu en parle ; et si alors elle meurt, impotente, « n’ayant plus de vivacité que pour les exercices de piété et de charité, se renfermant à méditer deux seuls livres, l’Evangile et les Psaumes, » ce qu’il faudrait savoir, c’est si cette belle vieillesse pieuse subissait l’influence de Bossuet ou si, au contraire, Madeleine plus jeune lui avait montré le chemin.

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  1. C’est une tradition, sans autres preuves, admise pour la première fois, ce semble, en 1842 par l’Année de Marie. Sur cette dévotion à Notre-Dame d’Étang, qui prit le plus grand développement en Bourgogne depuis la fin du XVIe siècle jusqu’au XVIIIe, voir le P. Dejoux, Histoire de Notre-Dame d’Étang, 1726, et G. Chevallier, Bulletin ecclésiastique du diocèse de Dijon, 1906. — Floquet, I, 407. Thomas, 74-75, 170. — La « dame Bossuet, » — qui, d’après les recherches de l’abbé Prunel (Revue pratique d’apologétique, 15 janvier 1911, et Revue d’histoire de l’Église de France, 25 juillet 1911), l’ut une des dames patronesses du « Monastère du Refuge, » que fonda, en 1653, la succursale de la Compagnie du Saint-Sacrement établie à Dijon deux ans auparavant par M. de Renty, — n’était probablement pas la mère, mais une belle-sœur, ou une cousine, ou une nièce de l’archidiacre de Metz.
  2. Floquet, 1, 544. J. Thomas, p. 75, 76, 79, 103-105, 179, 182-186.