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J’ai tout lieu de croire le renseignement exact, mon cher monsieur Renan, et comme j’attache grand prix à votre avis, vous seriez bien aimable de me développer, en quelques lignes, les raisons que je voudrais pouvoir apprécier, avant de me décider, mon départ étant presque arrêté.

Mes amitiés à Mme Renan. On m’écrit que M. Berthelot est assez malade à Naples. Le soleil italien m’attire beaucoup ; ici nous sommes au milieu des brouillards.

Je vous serre affectueusement la main.

NAPOLEON (Jérôme).


A S. A. I. le Prince Napoléon.


Paris, 12 février 1812.

Monseigneur,

Effectivement, causant il y a quelques jours avec une personne qui est en relations avec Votre Altesse, je lui exprimai quelques doutes sur l’opportunité du séjour que Votre Altesse voudrait faire à Rome. Ce sont moins des objections formelles que des appréhensions tirées de la situation singulièrement tendue de cette ville. Votre Altesse a eu une part de premier ordre dans la fin du pouvoir temporel de la papauté. C’est là à mes yeux un véritable titre de gloire, le pouvoir temporel des papes étant devenu quelque chose de tout à fait funeste à l’Europe, à la France, à la civilisation et à la religion entendue dans un sens élevé. Mais, justement à cause de cela, la présence de Votre Altesse à Rome ne sera pas un événement ordinaire. On y attachera une foule de significations ; on ne croira pas que Votre Altesse y sera allée seulement pour se reposer et chercher un climat meilleur pour sa santé. Si la présence de Votre Altesse est l’objet de manifestations favorables de la part des libéraux italiens, on glosera ; si elle provoque les récriminations des cléricaux, on glosera encore. Les relations du Gouvernement italien avec le Gouvernement actuel de la France, relations rendues très difficiles par les exigences du parti clérical, seront mêlées à tout cela. On y attribuera une part à Votre Altesse. Les pétitions des évêques, à l’effet d’obtenir que le Gouvernement français n’envoie pas de ministre près du roi d’Italie à Rome, viendront, dit-on, à la Chambre, ces jours-ci. Il