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Reichswehr lui rendit les honneurs et défila devant lui, le peuple lui fit des ovations sans nombre et les divers orateurs renouvelèrent entre ses mains le serment de fidélité aux Wittelsbach ainsi qu’à l’étendard noir, blanc et rouge de l’Empire [1].

Le Reich, depuis quelques mois, a interdit ces sortes de manifestations ; la Bavière ne songe pas à imiter son exemple.


Donc, en Bavière, le bolchévisme s’identifie avec la république qui, à son tour, est personnifiée par le Gouvernement de Berlin ; ceci suffirait, sans même tenir compte de tendances particularistes datant de loin, pour que la Bavière prit ombrage de toute injonction venant de la capitale du Reich. L’histoire récente des lois pour la défense de la République en est une bien frappante illustration.

Après Kurt Eisner, Gareis, Karl Liebknecht, Rosa Luxemburg, Erzberger, — Maximilien Harden et Scheidemann ne doivent qu’au hasard de ne pas faire partie de cette énumération, — Rathenau vient de payer de sa vie le tort d’être ou de paraître républicain. L’ombre de gouvernement qui siège à Berlin n’a encore pris aucune des mesures qu’il avait déclarées indispensables, après l’assassinat d’Erzberger, pour protéger le nouveau régime et ses fidèles. Cette fois, l’opinion publique s’émeut et l’appareil gouvernemental ose se mettre en mouvement. Le président Ebert prend des ordonnances qui, soumises par le chancelier Wirth au Reichsrath et au Reichstag, se proposent de conjurer les dangers dont la République est menacée. « Le péril est à droite, » dit, à la tribune, le chancelier. En effet, deux lois sont présentées. La première, dite « de Défense de la République » et qui peut avoir effet rétroactif, punit les crimes et les délits commis contre les institutions légales et leurs représentants. Criminels et délinquants seront désormais jugés par un tribunal spécial, sorte de haute cour de justice composée de magistrats et de personnages choisis par le Président de la République. Les Etats, comme le Reich, sont autorisés à dissoudre toute association et à interdire toute manifestation ou publication de nature soit à troubler l’ordre public, soit à nuire au régime établi ; les membres des anciennes familles régnantes

  1. On sait que, depuis la révolution, le drapeau national est noir, or et rouge.