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non seulement impartiaux, mais germanophiles. Il en est vite résulté que ses nouveaux sujets, inspirés par les Bavarois leurs voisins et amis, loin d’être reconnaissants d’un procédé si honnête, ont bientôt considéré l’Italie avec le plus grand mépris. Elle nous traite humainement, donc elle est faible, et elle a peur de nous ; c’est ainsi qu’ils ont raisonné : et en conséquence, ils se sont refusés à reconnaître sa juridiction, sa souveraineté ; ils ont prétendu se dérober à l’obligation du service militaire, exigeant une milice locale et indépendante ; quand le Roi est allé visiter les territoires annexés à la couronne, ils ont profité de l’occasion pour affirmer devant lui leur nationalité persistante. Le Deutscher Verband se dresse contre l’Italie. Et l’Italie, quelque bonne opinion qu’elle ait de la vertueuse Bavière, principale cause du mal, trouve qu’en l’espèce elle manque au moins de savoir-vivre et de bon goût.

« Ainsi les Allemands sont accueillis à peu près comme autrefois : toute la différence est dans l’à peu près. Mettez encore, dans cet à peu près, une nuance de contentement malicieux. Ils ont pourtant été battus, ces rois de la guerre, ces officiers qui possédaient le secret de la tactique et de la stratégie, ces ingénieurs si fiers de leurs canons monstrueux, ces savants qui mettaient leur science au service de la destruction ; ils ont été battus par les Italiens ; et tout battus qu’ils soient, ils sont trop contents de revenir en Italie...

« L’Angleterre : situation privilégiée. Maîtresse des mers, impérieuse et têtue, c’est un pays avec lequel il ne fait pas bon plaisanter. Comme elle est séparée de l’Italie par une respectable étendue de terre et d’eau, comme on ignore généralement son langage, et que d’ailleurs les Anglais sont gens fort réservés, il n’y a pas entre les deux pays de ces piques d’amour-propre qui finissent par envenimer les meilleurs rapports. Depuis le XVIIIe siècle, il est entendu que les Anglais sont des gens riches, et qui savent se servir de leurs richesses : ce principe n’a pas varié. En effet, l’Angleterre ne lésine point. On n’ose guère la critiquer, quoi qu’elle fasse. Son alliance ne cesse pas d’être considérée comme le plus grand des biens. Quand sa politique est favorable à l’Italie, on l’exalte ; quand elle est défavorable, on proteste, mais faiblement. Ce sont à peine des reproches, sauf de la part de quelques énergumènes qui tiennent à se singulariser ; ce sont des plaintes, des soupirs. Notez toutefois, puisque