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Elles commencèrent avec la nouvelle que les armées du Kouban avaient évacué Ekaterinodar et s’étaient retirées dans les montagnes au delà de la rivière Kouban.

Justement nous venions de remporter à Korenevskaïa une victoire brillante, qui devait préluder à notre jonction avec les Cosaques du Kouban, que nous comptions rejoindre en deux ou trois étapes. Au lieu de marcher vers la ville promise d’Ekaterinodar, nous obliquâmes vers l’Est, quittant la grande route, et traversâmes la voie ferrée au Sud de la station de Stanitchnaïa.

A marches forcées de nuit et de jour, nous arrivâmes à Oust-Labinsk, à l’endroit où les rivières Kouban et Laba se rejoignent. Près de Oust-Labinskaïa, nos armées, conduites par les généraux Markoff et Bogaevsky et sous le commandement suprême du général Korniloff, dispersèrent assez aisément les troupes rouges sur la voie de chemin de fer d’Ekaterinodar à Armavir, traversèrent cette voie, ainsi que les rivières Kouban et Laba, et arrivèrent à la stanitza Nekrassovskaïa.

Ainsi, malgré la grande supériorité de l’ennemi en forces et en armes, malgré les trains blindés et l’artillerie, malgré l’embarras causé par l’interminable convoi de notre armée, le général Korniloff était parvenu à nous faire sortir de la région du Kouban. Durant ce temps (du 14 février au 6 mars) nous avions fait plus de 350 kilomètres, par des routes affreuses ; nous avions traversé quatre fois les lignes de chemin de fer qui toutes étaient occupées par les bolchévistes. Cela, sans pertes en prisonniers, sans pertes en artillerie et en matériel, avec, de notre côté, un minimum de dépenses en munitions. De plus, dans les combats de Lejanka, de Viselki et de Korenovskaïa, principalement dans ce dernier et dans celui de Oust-Labinskaïa, notre armée put compléter ses provisions qui, au départ de Rostow, étaient des plus minimes.

Au delà des rivières Kouban et Laba, nous devions entrer, à ce qu’il nous semblait, dans la sphère des opérations de l’armée du Kouban. Là commençait une région entrecoupée de montagnes, dérivations des monts caucasiens.

Je n’oublierai jamais notre départ de Nekrassovskaïa. Ce village est situé sur une assez haute montagne, au sommet de laquelle est édifié un temple magnifique qu’on voit de très loin. A nos pieds, par des dizaines de ruisseaux printaniers, débordait