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Ce fut la recrudescence de l’agitation fasciste qui amena sa démission. À Crémone, une troupe de fascistes brûlèrent la maison du député Miglioli qui appartient à la fraction la plus démocratique du parti populaire. Cet incident grave et d’autres du même genre, eurent à la Chambre un si violent retentissement que les chefs du parti populaire, M. Meda dans le Parlement, don Sturzo hors du Parlement, durent renoncer à soutenir un cabinet trop faible pour maintenir l’ordre. Ce fut l’origine de la crise.

Réduire les fascistes à l’obéissance à la loi : toutes les négociations ont évolué autour de ce problème. Ni fascistes, ni socialistes, exclusion des extrêmes : telles étaient les conditions mises par les populaires à leur collaboration. Appelé le premier, M. Orlando se récusa. M. Salandra, chef de la droite, ne crut pas pouvoir désolidariser sa politique de celle du fascisme : second échec, auquel une menace de grève générale ne fut pas étrangère. Une tentative de M. Bonomi échoua par l’opposition des divers groupes dits démocrates. Le chef parlementaire des populaires, M. Meda, appelé à son tour, déclina l’invitation et déclara que l’heure n’était pas venue d’un cabinet de son parti. M. de Nava, démocrate, qui pouvait compter sur des sympathies à droite, trouva à gauche des obstacles insurmontables. Nouvelle apparition de M. Orlando auquel M. Mussolini offrait sa collaboration, s’il pouvait, en même temps, obtenir celle des socialistes : ceux-ci se récusèrent. Il ne restait plus qu’une ressource, reconstituer le cabinet Facta en maintenant l’exclusion des socialistes et des fascistes et en se bornant à quelques changements de personnes dont voici les plus caractéristiques : M. Peano, giolittien, ministre du trésor, cède la place à un ami de M. Nitti, M. Paratore ; en revanche, le ministre de la guerre, prince di Scalea, de la droite, est remplacé par un giolittien, M. Soleri ; enfin la présence à l’Intérieur d’un fonctionnaire qui a donné des preuves d’énergie, le sénateur Taddei, préfet de Turin, est. aux yeux des populaires et des socialistes, une garantie que l’agitation fasciste sera réprimée (2 août). Il en est temps !

Les premiers jours du nouveau ministère sont troublés par une véritable guerre civile. Les communistes proclament la grève générale (1er août) et M. Mussolini lance un ultimatum au Gouvernement, lui donnant deux jours pour arrêter la grève générale, et mobilise ses partisans. Commencée sans enthousiasme, sans participation des organisations syndicales, ni de la C. G. T. italienne, combattue par le Gouvernement, contrecarrée par l’organisation fasciste qui aide au fonctionnement des services publics, la grève est un échec caractérisé.