Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 10.djvu/882

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Mulhouse (1826), la Société industrielle minérale de Saint-Étienne (1855), la Société industrielle du Nord (1873), celle de l’Est (1883), sont devenues de puissants organismes qui stimulent, la vie industrielle, et souvent la vie savante de toute une région.

Ces associations savantes et littéraires, qui ne sont pas moins de six cent cinquante à sept cents dans la seule province, apportent de très précieux éléments nouveaux au recrutement des Académies, lesquelles sont presque toujours des compagnies réunissant en un heureux accord « les sciences ; belles-lettres et arts. » Encore, à toutes ces causes qui favorisent la renaissance de nos académies, faut-il ajouter le développement de l’instruction publique, des établissements techniques, agricoles, des observatoires et « stations » scientifiques diverses, qui ont multiplié dans nos provinces les hommes d’étude.


Les Académies sont des institutions libres, fondées par des initiatives privées et qui réunissent des hommes épris de belles-lettres, d’art, puis de science, à partir de la seconde moitié du XVIIe siècle. Les académiciens sont, à l’origine, des amateurs, écrivains, gentilshommes, magistrats, prêtres ou religieux, grands fonctionnaires, professeurs, échevins, qui veulent se réfugier dans le libre royaume de l’esprit, et, sans le marquer expressément, échapper ainsi, au moins pour quelques heures, aux abus du pouvoir et aux tracas du siècle.

Ces compagnies ont d’ailleurs un principe commun, qui n’est pas sans heurter le puissant principe de castes qui domine alors la société française : l’égalité académique, l’égalité de chacun devant la loi de l’esprit, qui sera maintenue si fermement par Duclos, le secrétaire perpétuel de l’Académie française, contre les prétentions à la préséance du prince du sang, Louis de Bourbon-Condé, ou du maréchal de Belle-Isle.

Ce principe de l’égalité académique est d’ailleurs appuyé sur des privilèges spéciaux, et par cela il convient admirablement aux Français qui ajoutent si facilement à leur sens de l’égalité un goût non moins puissant des distinctions. Les créateurs de la Charte des droits de l’homme et du citoyen, un peu plus tard, manqueront visiblement de psychologie en ne décidant pas, à l’imitation des Polonais, que les Français sont tous égaux et gentilshommes.