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Sciences morales, une partie de leurs places aux savants des provinces. Enfin à l’une des dernières séances publiques, M. Émile Picard, faisant, à l’Académie des Sciences, l’éloge de Pierre Duhein, tint à dire : « Je suis heureux de rendre, en sa personne, hommage à ces savants qui, en dehors de la capitale, contribuent au bon renom de la science française. » Quelques jours plus tôt, à la « séance des prix de vertu, » le directeur de l’Académie française avait dit, faisant appel aux Académies de province pour l’attribution des prix Cognacq-Jay : « Nos Académies de province sont peuplées de vrais savants et de lettrés délicats. Trop souvent leurs travaux expirent aux limites de leur province. C’est grand dommage. Nous avons un même patrimoine à défendre. Comme elle a partie liée avec la jeune Académie de Belgique, pour la diffusion de la langue française à travers le monde, pourquoi l’Académie française ne s’entendrait-elle pas avec les Académies de province, afin de travailler à la conservation des souvenirs de notre passé, et à l’accroissement des richesses littéraires de la mère-patrie ? C’est un grand tort de s’ignorer les uns les autres. Et la France, qui a besoin de toutes ses forces, se réjouirait, une fois de plus, de leur union… »

« La France a besoin de toutes ses forces… » C’est à cette même cause qu’il faut rattacher la réforme des Universités, qui a eu une influence si heureuse sur la vie intellectuelle de la province. Réalisée de 1885 à 1896, grâce à l’initiative et à la persévérance d M. Louis Liard, cette réforme, par la personnalité civile accordée aux Facultés et le groupement des Facultés en Universités, a rendu à nos grandes villes des savants et des lettrés éminents, parmi lesquels trouvent facilement à se recruter les Académies provinciales.

À ces causes de renaissance, il faut ajouter encore l’extraordinaire développement, pris, pendant tout le cours du XIXe siècle, par la science et l’industrie et qui s’amplifie encore aujourd’hui. Ce mouvement nous valut la création, depuis le Consulat et jusqu’à nos jours, de très nombreuses sociétés savantes, portant des titres divers : Sociétés des sciences. Sociétés médicales, Sociétés archéologiques, comme « la Société des Antiquaires de l’Ouest, » fondée à Poitiers, en 1834, et qui a eu une carrière si brillante. Sociétés d’agriculture, Sociétés botaniques. Sociétés historiques, Sociétés de géographie. Sociétés industrielles. Quelques-unes de ces dernières, comme la Société industrielle