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ne sont pas des Trissotins, et ne vouent pas leur haine et leur rancune à quiconque les a critiqués ou leur a fermé la porte… Maintenant, mon cher monsieur, soyez bien convaincu d’une chose : Mon article vous aurait paru bon et vous l’auriez pris, que celui de la Civiltà n’en aurait pas moins été reproduit dans l’Univers. En donnant un travail à la Revue, je ne passe pas plus sous ses drapeaux qu’elle ne passe elle-même sous le mien. Je vais chez elle avec mon but, elle me reçoit dans le sien, voilà tout… Voilà ma réponse. Je désire qu’elle ne vous fâche pas plus que je ne l’ai été de votre lettre, où je ne veux prendre que l’avertissement de ne plus vous offrir de copie. Pour le surplus, restons où nous en étions. Quand cela ne serait que pour avoir l’un et l’autre une main honnête de plus à serrer dans le pays littéraire. Mille amitiés.

LOUIS VEUILLOT[1]. »


On voit que la lettre de Louis Veuillot, si nette dans la forme, ne répond aucunement dans le fond aux reproches que fait François Buloz au directeur de l’Univers. Aussi celui de la Revue (qui est fort entêté) répliquera-t-il le 8 mai : « Entre gens comme il faut, comme vous le dites, on ne se calomnie pas, on ne va pas du moins ramasser les sottes accusations d’un journal qui ne paraît pas savoir votre langue, et si vous avez l’opinion de la Civiltà Cattolica sur la Revue, tant pis pour vous, c’est que vous ne la lisez pas ou que vous ne voulez pas nous comprendre. (Je ne puis cependant m’empêcher d’ajouter : si vous avez cette opinion aussi bien que vous le dites, pourquoi nous avez-vous donné et offert votre concours ?) Vous êtes bien le maître de faire de la discussion contre la Revue, si vive, si dure qu’elle soit ; mais il n’est pas permis à l’Univers de nous prêter des opinions que nous n’avons pas, de nous jeter à la tête des accusations sans fondement. Vous dites que mon commerce avec les gens de lettres fait faire fausse route à mon opinion : dans cette circonstance, vous vous trompez : je ne connais pas d’écrivain qui eut fait ce que j’ai lu dans l’Univers… »

Je ne sais si François Buloz rendit jamais à Louis Veuillot la visite qu’il lui avait promis de lui rendre. Mais quelques années plus tard, Veuillot écrivit le Parfum de Rome, et George

  1. Mai 1857. Inédite.