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d’un fourneau dans l’ouvrage principal, qui avait été chargé de 1 000 kilogs de poudre. Au signal de l’explosion, on devait se lancer en avant et retourner les parapets contre l’ennemi.

Ma relève n’ayant pas permis de mener à bien cet assaut, je me suis borné à faire exploser ma mine. Cela vient d’avoir lieu : énorme, un vrai Vésuve : Boches en l’air, les autres fuyant à jambes que veux-tu ; le fort est bouleversé.

Enfin, cela frappera toujours les Boches. Il parait d’ailleurs que tout va bien. Ce système de guerre ne permet pas de succès dramatiques avec généraux au galop sur la ligne des tirailleurs et charges de cavalerie, mais, sur tout le front, aux points où des pesées sont exercées, nous avançons, bien que lentement, et dominons l’adversaire.

Donc, ayons confiance.


EN ARGONNE


Montdidier, 11 janvier 1915.

Subitement un ordre de départ est arrivé cette nuit et m’envoie en Argonne où, paraît-il, on a besoin d’un corps d’armée énergique. Ce n’est donc pas moi qui donnerai le coup décisif car, dans la contrée où je vais, il ne saurait s’agir que de défensive. Je sais au surplus que l’ennemi (XVIe corps) y est extrêmement actif.

Enfin, inch’Allah !


15 janvier 1915.

Me voici installé sur mon nouveau champ d’action : l’Argonne. Combats de bois sans trêve ni répit. Le CA que je relève s’y est usé depuis quatre mois, sans succès, reculant pas à pas, mais enfin subissant l’ascendant de l’ennemi. Réussirons-nous mieux ? J’y vais employer toute ma force, mais il est incontestable que la vie est sévère, par ici. Et puis, que d’humidité, que de boue !

Mon CA se compose désormais des 40e et 42e DI. C’est l’ancien 6e corps ; troupes magnifiques, que le grand chef a voulu me confier.


19 janvier 1915.

Ici la vie est dure ! Dans ces bois, elle prend un caractère tragique particulier. Les Allemands, provenant de la garnison