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duré tout un mois, a révélé des qualités militaires brillantes ; mais les autres se sont crânement comportés.

Patience, confiance en la France éternelle !


Poperinghe, 16 décembre 1914.

C’est pour toi la veillée des armes ; demain, tu prendras part à la grosse attaque d’A... Je pense bien à toi, en ces heures graves, priant Dieu de te préserver au milieu du danger et de bénir nos efforts. L’affaire est, paraît-il, bien préparée ; beaucoup d’artillerie lourde et du monde d’attaque. Dieu veuille vous aider !

Par ici, j’en suis à mon troisième jour d’offensive : mes succès sont modestes et pourtant ils ont été chèrement acquis : quelques bouts de tranchées à une centaine de mètres en avant : possession dont on est fier, bien qu’il n’y fasse guère bon vivre : de la boue jusqu’à mi-jambes et des balles en excès.

Aujourd’hui, j’ai monté une attaque sur la fameuse cote 60 (le Mamelon Vert, comme l’appellent les troupiers). Les deux bataillons d’assaut sont parvenus au pied du talus de la redoute ennemie ; j’ai lancé la réserve il y a une heure ; j’attends le résultat.

Que de braves gens sont sacrifiés ainsi !


23 décembre 1914.

... Les Allemands sont partout sur leurs gardes ; ils ont eu connaissance de l’ordre d’offensive générale du Grand Quartier ; devant moi, ils sont serrés dans leurs tranchées comme des harengs dans une caque, aussi ils écopent quelque peu. C’est le fameux XVe Corps que j’ai pour vis-à-vis, de rudes hommes.

Je continue mon attaque de ce qu’on appelle le Mamelon Vert ; un assaut brusqué m’a conduit jusque dans le fort qui le couronne. Coût : 15 officiers, 1 500 hommes ; mais les éléments dissociés qui y avaient pénétré ont été chassés par une contre-attaque vivement menée par les Allemands et rejetés en bas du talus, où ils se sont cramponnés, ce qui fait que nous sommes en cet endroit à 10 mètres de l’ennemi. Je prépare un assaut genre Sébastopol : galerie de. mine, bombardement, rafales, coups de mains, etc. Mais le fourneau de 600 kilos de poudre que je creuse sous les Boches sans qu’ils s’en aperçoivent, — ce qui est fantastique, — ne sera terminé, sauf accroc, que