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« club du travail constitutionnel ; » mais ce parti est à la fois conservateur et dévoué à la politique personnelle du chef de l’État ; son organe, le Czas, de Cracovie, soutient que la Pologne ne peut se passer de l’autorité quasi dictatoriale du maréchal Pilsudski, Le 7 juillet, ce club, votant avec les droites, provoqua la démission du cabinet Sliwinski, mais il ne suivit pas longtemps loin la majorité parlementaire. Celle-ci, la tentative du chef de l’État ayant échoué, voulut à son tour constituer un ministère de son choix ; elle désigna le patriote populaire à qui la Pologne est en grande partie redevable de son succès dans l’affaire de la Haute-Silésie, M. Korfanty. Celui-ci constitua, avec MM. Skirmunt, Michalski et d’autres personnalités marquantes, un cabinet où les groupes de la majorité étaient équitablement représentés. Mais, quand il se présenta au chef de l’État, celui-ci déclara qu’il refusait de collaborer avec un Président du Conseil dont il n’approuvait pas les idées. Cette attitude du Maréchal changea les dispositions du petit groupe cracovien ; la majorité devint minorité. M. Korfanty, ne voulant pas entrer en conflit aigu avec le chef de l’État, renonça à exercer le pouvoir. Les choses en sont là Le Maréchal va sans doute constituer un ministère extra-parlementaire que peut-être l’Assemblée, à son tour, refusera de soutenir. Il s’agit de savoir qui détiendra le pouvoir au moment des élections du 1er octobre ; les partis de gauche, qui semblent avoir perdu du terrain dans le pays, soutiendront énergiquement la politique du maréchal Pilsudski qui, de son côté, ne peut espérer se maintenir au pouvoir que s’il constitue une forte majorité qui lui soit dévouée. A nos yeux de Français qui ne veulent, en Pologne, connaître que des amis, ces luttes apparaissent déplorables ; la Pologne, en face de ses adversaires du dehors et en présence de l’œuvre immense de la patrie à reconstruire, a besoin de tous ses enfants. Le pouvoir personnel très étendu du chef de l’État pourrait devenir, dans la situation actuelle, un bienfait, mais à la condition qu’il ne gouverne qu’avec l’appui et le concours de tous les partis nationaux. Si la Pologne a besoin d’un Pilsudski, elle ne saurait écarter un Korfanty. Trêve donc aux luttes de partis.


RENÉ PINON.


Le Directeur-Gérant :

RENÉ DOUMIC.