Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 10.djvu/472

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chronique 14 juillet 1922


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE

« Daté de Moscou, imprimé à Berlin : » ces mots par lesquels, dans la séance matinale du 5 juillet, M. Poincaré caractérisait la brochure infâme que les communistes ont répandue dans l’Afrique du Nord, pourraient servir d’épigraphe à tout le débat douloureux que la Chambre, frémissante et flétrissante, a entendu les 5 et 6 juillet. Tant de documents publiés, tant de preuves accumulées, de calomnies réfutées, tant d’aveux, peuvent-ils laisser encore quelques doutes sur les responsabilités de la guerre ? Non. Il n’y a pas de doutes ; il y a une campagne, une conspiration dont les fils partent de Berlin et de Moscou et qui trouve partout, en Angleterre, aux États-Unis, en Italie, en France même, des complices ou des dupes. Tout l’édifice du traité de Versailles, tout le système juridique des réparations, reposent sur la culpabilité établie et avouée de l’Allemagne. Ébranler cette certitude, jeter des doutes sur les responsabilités, les partager même inégalement, c’est, pour l’Allemagne, le chemin qui conduit à la révision du Traité et à l’abolition des réparations. Toute la campagne « Poincaré-la-Guerre » trouve là son origine et son objet. La formule brève, saisissante, se fixera dans les esprits. Qu’importe qu’elle soit dénuée de sens ! Il en restera toujours quelque chose. Quel succès, pour certains chefs communistes français, s’ils pouvaient faire croire Guillaume II innocent et Poincaré coupable ! Quel avantage surtout s’ils accréditaient le soupçon que Poincaré veut une nouvelle guerre ! C’est ainsi qu’ils préludent à la réconciliation des peuples.

La campagne se poursuit depuis longtemps, alimentée du dehors, dirigée par des chefs d’orchestre habiles, mais invisibles. Déjà dans son beau discours au « banquet Mascuraud » (1er juillet), M. Poincaré, aux applaudissements de toute l’assistance, parlait des « fantômes de 1917 » qui, de nouveau, rôdent à travers notre politique. Une insinuation particulièrement odieuse de M. Vaillant-Couturier,