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qui nous a poussés jadis en Russie et en Turquie ; ces deux exemples suffisent à prouver que, même abstraction faite des pertes financières, il peut exposer à des disgrâces. Les peuples modernes sont, en vertu de leur mobilité parlementaire, peu respectueux de leurs engagements ; le hasard d’une élection, un changement de ministre, de président ou de régime suffit pour annuler des promesses ou des traités antérieurs, et le cœur humain est toujours facilement accessible au désir d’éliminer un créancier.

Financièrement, la question est encore plus discutable. Depuis la paix, c’est par centaines de millions que les capitaux français sont partis pour l’Europe centrale. Les pouvoirs publics y poussaient ; les particuliers se laissaient facilement convaincre dans un temps où les Sociétés métallurgiques notamment regorgeaient de capitaux. On a voulu montrer de l’initiative, de la hardiesse, une large conception de l’avenir, profiter des occasions favorables que procuraient la situation politique elle change. Les affaires de Pologne, de Bohème, de Roumanie, ont eu la vogue et les embarras actuels de certaines grandes trésoreries industrielles en résultent pour une bonne part. En dehors de ces difficultés passagères, il y a un danger évident à immobiliser trop de capitaux français dans des placements d’avenir à longue échéance, qui ne seront susceptibles d’aucune mobilisation rapide dans un avenir prochain. Il ne faut pas oublier que l’équilibre précaire de notre situation financière repose en grande partie sur la confiance que conservent les étrangers dans le relèvement rapide du franc. Nous devons beaucoup et nous avons l’habitude de payer nos dettes ; on nous doit bien plus encore, mais il est visible que, de concession en concession, nous arrivons à ne toucher à peu près rien. Une crise de confiance peut brusquement précipiter notre change comme cela s’est produit pour l’Allemagne. Méfions-nous d’acheter trop aisément tout ce qui nous parait à bon marché. Ces « occasions des Grands Magasins » sont souvent un leurre.

En ce qui concerne plus spécialement la Haute-Silésie, je crois avoir donné les principaux éléments d’appréciation. J’ai montré un gisement magnifique, une richesse en houille énorme, une superbe industrie du zinc, des conditions ouvrières qui furent très avantageuses et qui peuvent redevenir acceptables, mais aussi une position commerciale qui offre des difficultés et