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guerres ont exercé leurs remous, les attaches politiques ont changé au cours des siècles. Toutes nos nationalités sont des mélanges confus de races et on ne saurait attribuer un pays quelconque à un peuple quelconque sans commettre une injustice à l’égard d’un peuple antérieur, fallût-il remonter à l’âge de pierre. A plus forte raison quand il s’agit d’un pays forgé récemment de toutes pièces par les initiatives humaines. Jusqu’au XIXe siècle, la Silésie, au sens où nous l’entendons aujourd’hui, la Silésie industrielle n’existait pas. Il y avait là un autre pays, un pays agricole avec d’autres mœurs et d’autres besoins, auquel le pays actuel s’est superposé en le masquant à la façon d’une strate sédimentaire, sous laquelle on aperçoit à peine encore, dans quelques ravins, les strates plus anciennes. Un défaut de l’idéologie, qui a prétendu brusquement réaliser sur la terre l’équité céleste, est d’avoir oublié que, dans le ciel, vers lequel nous aspirons tous, il n’y a ni strates superposées, ni charbon de terre, ni hauts fourneaux, ni hommes ayant besoin de manger et, par conséquent, de se disputer leurs aliments.

Comme histoire politique, il nous suffira de savoir, — ce qui ne saurait guère être contesté, — qu’en Haute-Silésie, le fond de la population est polonais catholique et que, sur ce fond polonais, s’est établie, depuis un siècle, une immigration allemande protestante d’origine industrielle, particulièrement concentrée dans les villes. D’où le conflit de nationalités entre les villes et les campagnes qui a tant compliqué le partage. Il n’a pas été inexact de porter, comme on l’a fait, le litige sur le terrain démocratique, en disant que les paysans et ouvriers sont là en très grande majorité polonais, les dirigeants pour la plupart allemands. Puisqu’on est généralement convenu d’admettre, dans notre forme de gouvernements modernes, qu’un homme en vaut un autre, les Allemands n’avaient aucun droit à revendiquer un pays, dans lequel ils étaient à coup sûr les plus agissants, mais aussi les moins nombreux.


Ouvrons donc une carte géologique pour voir ce qu’a fait ici la nature, avant d’examiner le profit qu’en ont tiré les hommes. Ce nous sera, en même temps, une occasion de situer quelques noms géographiques, avec lesquels tous les articles