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Lyon, jeudi 4 mai 1826.

« Mon cher M. Le Moine, Mme de Chateaubriand a eu une maladie différente de ses maux ordinaires : elle est maintenant sans fièvre. Mais nous ne pouvons partir pour Lausanne avant une huitaine de jours. J’espère vous ramener notre pauvre voyageuse au mois de septembre : elle en a un grand désir qu’elle ne montre pourtant qu’à demi. »

Au reste, les Lyonnais, gens de foi et de loyauté royaliste, font mille caresses à l’auteur du Génie et au ministre déchu :


Lyon, le 6 mai.

« Mon cher M. Le Moine, vous seriez bien heureux si vous étiez ici, et si vous voyiez la manière dont j’ai été reçu par la seconde ville du royaume : les journaux sans doute vous en parleront. Je vous apprendrai de plus que Mme de Chateaubriand est déterminée à revenir au mois de septembre, et qu’elle ne rêve que l’Infirmerie. Pour preuve de ceci, je vous prie de vous transporter dans notre vieille maison, rue du Regard. Vous trouverez sous la remise une balle de livres que j’avais préparée pour deux ans. Je n’en ai plus besoin. Veuillez la faire porter à la, petite maison de l’Infirmerie et déposer auprès des autres caisses dans le salon.

« Quant aux lettres, je vous ai prié de les décacheter toutes, excepté les lettres d’Italie[1]. Vous ne m’enverrez pas celles qui vous paraîtront inutiles. Les autres, vous aurez la bonté de les adresser poste restante à Lausanne. Nous partirons lundi prochain, 8, pour la Suisse. Nous irons à petites journées à cause de la pauvre malade qui va pourtant de mieux en mieux, et nous arriverons à Lausanne mercredi, 10 de ce mois. — Mille amitiés et mille hommages à votre belle-fille[2].

« Mme de Chateaubriand me charge de toutes ses tendresses pour vous. Ecrivez-lui et dites-lui merveilles de sa petite maison. »

Cette fois. Chateaubriand n’habite point une « cabane » comme deux ans plus tôt à Neuchâtel ; il a ses aises dans de confortables appartements meublés ; locataire tour à tour de

  1. C’étaient les lettres de Mme Récamier, qui voyageait en Italie.
  2. M. Le Moine avait marié son fils aîné, le 3 avril précédent ; et Chateaubriand avait été, par procuration, témoin de ce mariage.