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les plus paresseuses, l’Art a aidé le Maréchal : il le lui rend aujourd’hui.


III. — LES COIFFES

Pour que l’aide soit plus complète et le succès mieux assuré, toques, perruques et grands chapeaux sont, çà et là entremêlés de quelques coiffes. Des figures de femmes égaient cette hautaine assemblée, — bien qu’à vrai dire ce ne fût pas tout à fait nécessaire. A ne consulter que les apparences, la Rotonde semblait, déjà, receler plusieurs dames déguisées en guerriers et les atours de plusieurs sont infiniment plus coquets ou riches que le costume sévère, par exemple, de la connétable de Montmorency ou de Luynes. Toutefois, on a cru qu’il fallait parer l’héroïsme de grâce et qu’une collection de portraits ne pouvait plaire à Paris, s’il n’en contenait pas de féminins. Il est vrai que plusieurs de ces dames font partie de notre histoire militaire. La carrière de beaucoup de chefs eût été autre sans elles. Non qu’elles se soient embarrassées de conceptions stratégiques de la guerre. Mais elles ont manœuvré ailleurs que sur les champs de bataille, non sans profit pour leurs maris, et parfois non sans danger.

Il est curieux, aussi, de noter la continuité de leur maintien à travers les siècles. L’homme, au fond, change peu, mais la femme change moins encore. Si nous regardons celles qui sont ici, depuis la connétable de Luynes jusqu’à la comtesse Lobau, nous ne leur trouverons aucun trait qui les distingue époque par époque. Elles diffèrent, mais individuellement, non en bloc. Les nécessités diverses de la politique et de la guerre, les inventions nouvelles, les idées nationales, qui si profondément modifièrent la stratégie et la technique militaires, n’ont rien changé à la tactique féminine, innée, parfaite et dès lors non perfectible. Elle reste sensiblement la même dans les appartements de Versailles ou la salle des maréchaux aux Tuileries, qu’au Louvre des Valois. A toutes les époques, on distingue, chez ces femmes de grands chefs, trois types : celles qui les servent, celles qui les desservent et celles qui les remplacent, — ce qui est une façon encore de les desservir, du moins devant la postérité. Le type de celles qui les servent est représenté ici par la connétable de Montmorency, celles qui