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faite des cheveux qu’on laisse croître et qu’on ondule ou qu’on tresse, ou qu’on noue çà et là : telle la cadenette gauche chez le maréchal de Guébriant, et chez Henri II de Montmorency, d’ailleurs agrémentée de cheveux artificiels et ondoyants, floue, comme la queue d’une comète, d’où le nom de « coiffure à comète, » qui coïncide avec la Fronde et les dernières fantaisies individuelles. Puis elle s’aplatit sur le front et tombe en chute droite en demi-cercle sur les épaules, déjà plus disciplinée « coiffure à la calotte, » même sans calotte, jaillissement d’une pomme d’arrosoir, comme chez d’Hocquincourt et Fabert. Cela coïncide avec l’établissement de la discipline de Versailles. Puis, grâce aux postiches, peu à peu elle enfle, bout, croit, s’accroît, se roule en boucles, monte à gros bouillons au-dessus de la tête, à la Fontange, enfin s’écroule et se tord en boudins, déborde la tête et s’épanche de toutes parts en cascades rebondissantes, vêtant les épaules, le dos, le torse tout entier d’une toison soyeuse et poudrée, comme chez le Puységur, de Largillière, jusqu’à ce que, soulevée comme une écume et dispersée au souffle du vent, elle suive la tête et la façon d’une crinière. Nous sommes alors au comble de la discipline et de l’artifice. Rien de plus incommode que ces perruques à la guerre ; elles repoussent le chapeau à trois gouttières, elles prennent facilement feu. Luxembourg a la sienne grillée par des éclats de grenade à la prise de Valenciennes. A ce moment, bien qu’on parvienne à les faire sur un bâti léger, avec des cheveux très fins, elles atteignent le poids d’un kilo et on ne peut plus les porter : alors on les divise et on les noue. Le premier maréchal Harcourt chez Rigaud, a encore la perruque in-folio flottante, le second, dans le buste de Slodtz, a déjà la perruque nouée. Puis on l’emprisonne en bourse, elle s’affaisse ensuite chez le maréchal de Richelieu par Valade, où les rouleaux de cheveux changent de direction et, au lieu de tomber dans le sens vertical, s’étagent dans le sens horizontal, puis elle se roule et s’effile en « bout de rat » chez le maréchal de Saxe de Liotard, et c’est une mince queue de Chinois que tranchera l’aide du bourreau, avant la guillotine.

Ce sera décisif. De longs cheveux flotteront encore avant de disparaître, autour des têtes de quelques maréchaux de l’Empire, comme un dernier halo de la « comète » de Louis XIII. Même certains comme Augereau, Lannes, Bessières, Moncey,