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ne se relèvera plus. Lorsque la caravane a défilé tout entière, lorsque le bruit familier s’amoindrit à distance, l’animal prend peur de la solitude. Une dernière fois, il tend le cou vers la vie qui s’éloigne. L’effort est vain. Alors le méhari résigné pose sa tête lasse sur le flanc, et, doucement, il expire. Le fidèle serviteur disparaît, sans murmure, puisque son œuvre continue... »

N’avais-je pas raison de dire, en commençant, que ce livre de Paul Adam est, sinon le plus beau, du moins le meilleur, le plus sain, le plus vivifiant qu’il ait écrit ? D’un bout à l’autre, il y circule un souffle de lyrisme et d’épopée. C’est un coup de clairon entraînant. Et cet appel guerrier n’est pas une vaine fanfaronnade. Il convie les cœurs intrépides, les hommes aux corps rudes et à la volonté inflexible à des tâches viriles dont le bénéfice est évident et la gloire assurée. La véritable action française, ce sont des voyants comme lui qui la prêchent, en désignant à l’énergie nationale des buts certains, au lieu de consumer son effort en critiques et en disputes la plupart du temps infécondes, — et enfin en invitant la race à se retremper dans un milieu jeune, où elle reprendra les vertus qui font des peuples vigoureux d’abord, — c’est là chose essentielle, car on ne bâtit rien sur la décrépitude, — des peuples assez forts pour se lancer joyeusement vers l’avenir et s’imposer par raison les disciplines nécessaires à toute grande entreprise.


LOUIS BERTRAND.