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en francs, en livres ou en lire, c’est une charge nouvelle qui tomberait sur des budgets déjà très obérés.

M. Vanderlip expose que ce capital, prêté aux États inscrits pour la réalisation de son programme, serait affecté à des travaux productifs, et qu’ainsi il se reconstituerait graduellement pour servir ensuite à d’autres objets ou dans d’autres pays. Après avoir parcouru un cycle plus ou moins long, et grossi de ses intérêts, il reviendrait finalement en Amérique, à laquelle il aurait rapporté gloire et profit.

Enfin, cette politique, pour être féconde, devrait avoir comme point de départ une collaboration avec les nations les plus directement qualifiées pour coopérer à cette œuvre de relèvement, et c’est dans ce sens que nous aimerions voir ces idées s’élargir en faisant reconnaître que la France, qui a un grand rayonnement dans toute l’Europe orientale, profondément pénétrée par sa haute culture, pourrait être, pour l’Amérique, une excellente associée.


Pour comprendre et résumer les plans de M. Vanderlip, soit dans la création d’une « Gold Reserve Bank, » soit dans le règlement des dettes interalliées, il faut se rappeler sa pensée directrice, celle qui relie tous ses projets pour les tendre vers un même but : la formation des États-Unis d’Europe. Il nous propose l’exemple de son propre pays, dont toute l’histoire est précisément constituée par cet incessant effort pour soumettre les intérêts particuliers de chaque État au bien supérieur de tous. Quelque audace qu’il y ait, au sortir de la guerre, à venir nous prêcher cet évangile des temps nouveaux, nous ne pouvons pas cependant reprocher à un citoyen des États-Unis, qui considère son pays comme le plus grand dans le monde, de croire que son système politique et économique peut également faire le bonheur des nations de l’Ancien Continent.

Aussi, quel que soit le jugement que l’on porte sur les idées de M. Vanderlip, faut-il reconnaître qu’elles procèdent d’un sentiment élevé de la fraternité entre peuples. Il est de ceux qui estiment que les États-Unis ont des responsabilités vis-à-vis de l’Europe, et qu’ils doivent les assumer délibérément, par une juste compréhension de leur propre intérêt. C’est donc avec sympathie que, dans les circonstances actuelles, nous devons accueillir ces nouvelles manifestations de l’idéalisme américain.


MAURICE LEWANDOWSKI.