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ignorer que, sur sa demande, son salaire avait été fixé à un dollar.

Son rôle politique étant officiellement terminé avec la fin de la guerre, Frank Vanderlip ne désirait pas revenir sur le terrain des affaires ; il préféra chercher l’emploi de son activité dans des travaux d’enquête sur la situation européenne, en étudiant, avec une parfaite bonne volonté, sous quelle forme pouvait s’exercer le concours américain. C’est le résultat de ses observations que nous apporte son nouveau livre : What next in Europe ? [1] où se trouvent également ses plans de restauration économique et financière qui ont fait, tant en Europe qu’en Amérique, l’objet de nombreuses discussions.


Que va-t-il advenir en Europe ? Quelles que soient les erreurs d’appréciation possibles dans un aussi vaste sujet, M. Vanderlip a, du moins, le mérite de définir nettement la position des États-Unis à l’égard des problèmes européens. La théorie du splendide isolement n’est pas la sienne ; il estime, au contraire, que l’intérêt de son pays est de jouer les grands rôles dans l’œuvre de la reconstruction économique, sous peine de compromettre sa propre prospérité. C’est donc un travail de mutuelle compréhension, qu’à travers son livre poursuit M. Vanderlip, lorsqu’il s’efforce de faire connaître à l’Amérique les conditions réelles de l’Europe, pour nous exposer ensuite comment doit s’entendre l’aide américaine.

L’ouvrage comprend, dans sa première partie, une série de jugements sur l’Europe, présentés par un Américain qui a recueilli, dans un minimum de temps, un maximum d’idées, dont il voudrait tirer de salutaires enseignements. Dans cette étude consacrée à ce qu’il appelle « le chaos économique, » M. Vanderlip nous expose le point de vue américain bien connu, suivant lequel les États européens désorganisés et désunis se débattent au milieu d’inextricables difficultés, dont la faillite allemande serait la pire. C’est ainsi qu’il considère comme un dogme que le Traité de Versailles porte la responsabilité de tous les conflits présents ou futurs, alors que la face du monde eût été changée si l’on avait appliqué une formule qui lui est chère : la création des États-Unis d’Europe.

« Le Poison du Traité de Versailles, » tel est le titre d’un chapitre dans lequel cet instrument de paix est condamné comme une œuvre de haine, qui ne peut plus servir de charte pour la reconstruction de l’Europe nouvelle. Les Américains le renient, estimant qu’il n’est pas

  1. What Next in Europe ? par Frank A. Vanderlip. New-York, 1922.