Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 10.djvu/155

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand vous aurez fini de battre une peau d’âne
Pour habiller les vers de quelque pauvre oison [1]
Sans crainte que je vous condamne
Critiquez-moi, mon cher, sur Rime et sur Raison
Et je ferai raison sur Raison et sur Rime,
Si vous avez raison dans cette neuve escrime.
…………
Ma femme veut qu’ici je vous dise à son tour
Ce qu’on appelle en France une phrase, un bonjour ;
Elle vous répondra par la prochaine poste ;
Pourtant, elle n’est pas bien leste à la riposte
Et, quoiqu’en bon français elle écrive, entre nous,
Tout aussi bien que moi, tout aussi bien que vous,
Elle tremble toujours, quand elle se paraphe,
D’avoir fait une, deux, trois fautes d’ortographe.
Sa santé n’est pas mal ; madame Birch est bien,
Et dans cinq ou six jours son mal ne sera rien.
Votre petite nièce est toujours plus gentille ;
Elle fait en ces lieux l’honneur de la famille
Et chacun la voyant dit : Ah ! quel bel enfant,
Voyez donc, qu’il est gros, qu’il est gras, qu’il est blanc !

Mais, adieu tout de bon ! Car monsieur d’Hauterive
Et monsieur de Damas attendent ma missive.
Que diraient-ils, hélas ! s’ils savaient... Mais voici
Mon papier qui finit et ma faconde aussi.


Après l’échange d’épîtres autour de Milly, il s’établit un silence entre les deux poètes. Ce n’est point que Montherot se soit rendu à la joyeuse invite de son beau-frère (voir plus haut la lettre du 23 mars). Quelques pages, sans grand intérêt, datées d’avril et signées de lui, témoignent que les amis ne se sont pas rejoints « sur les vertes collines, » philosophant et se recueillant pour écouter tinter l’Ave Maria dans les tours de Florence.

Nous ne retrouvons Lamartine, dans l’album, que In 17 juillet. Mais la Correspondance, durant ce temps, nous renseigne sur son compte. Il parait avoir épuisé les joies de l’indépendance ; il n’a même plus le stimulant de la difficulté à

  1. On se souvient que M. de Montherot s’occupait de reliures.