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Et quand Lamartine, la semaine suivante, n’ayant vu poindre aucun voyageur en soierie, se résigne à expédier Milly par la poste, il s’en excuse :


Le 1er février, Florence.

« Je suis bien fâché de vous coûter trois ou quatre francs de port, mais j’ai pensé que vous payeriez volontiers cinq francs un volume où il n’y aurait que quatre cents bons vers ; si ceux-ci sont passables, ils valent le port ; sinon, rendez-les moi en même monnoie.

Aussitôt lus et copiés, envoyez l’original ou la copie à ma mère à qui je les annonce ; lisez-les à Virieu et n’en donnez à personne : ceux-ci doivent rester pour nous seuls.

Faites-moi l’amitié aussi de m’y faire rigoureusement de votre propre main les corrections qui vous sembleront nécessaires pour votre goût propre, et non pour le goût du prochain, et communiquez-moi ces critiques ; j’en ferai usage dans ce cas-ci et successivement pour toutes les Harmonies. J’en ai au moins deux volumes en portefeuille.

Adieu, mon cher, à revoir. Votre frère et ami,

LAMARTINE. »


M. de Montherot a reçu Milly et les recommandations qui l’accompagnaient. Il admire l’un et tient compte des autres. Il en tient compte avec une conscience et une application extrêmes. L’autographe de Lamartine, contenu dans le recueil, en peut témoigner ; son écriture est, en maints endroits, surchargée par celle du censeur et de multiples renvois proposent les modifications qui semblent les plus judicieuses au futur lauréat de l’Académie de Mâcon.

Je pensais donner à cette place une transcription intégrale du curieux document, texte et annotations. Les dimensions d’un article ne s’y prêtent malheureusement pas et il me faut encore priver le lecteur, ici du moins [1], de l’amusante épitre qu’adressera Montherot au poète pour justifier une à une les critiques et les corrections qu’il a cru bon de proposer. L’épitre débute ainsi :


Occupons-nous de vous. Dix-neuvième Harmonie !
Trois grands jours à Nogent, invoquant mon génie,

  1. On les trouvera dans une plaquette illustrée, qui sera prochainement publiée.