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Qu’au dernier bal de cour déshonorant la France,
Je fis par un faux pas manquer la contredanse,
Ou qu’on a remarqué qu’au cercle accoutumé
Le ministre d’Autriche était fort enrhumé !
Mais enfin, m’y voilà ! Dans ma large écritoire
Je vois l’encre fumer sous son écume noire
Et ce vil instrument qui supplée à la voix,
La plume du dindon, frémit entre mes doigts !
Mon prologue est fini. J’écris ; vous allez lire.
Farces de Carnaval, fuyez loin de ma lyre
Et ne profanez pas plus longtemps à nos yeux
Cet organe divin que nous devons aux dieux !
Mais on peut un moment permettre la folie.
………….
Tel pendant que le dieu qui commande au tonnerre
Boit aux pieds de Junon le nectar à plein verre
Et laisse reposer, pendant qu’il fait l’amour,
Tous ces pauvres humains si contents d’un beau jour,
On voit son fier oiseau, cet Aigle aux serres saintes,
Se coucher un moment sur ses foudres éteintes
Et, retenant l’orage encor flottant dans l’air,
Avant de le lancer jouer avec l’éclair !

P.-S. — Mais je ne pensais pas que le paquet trop gros
Pèserait à la poste au moins cinq à six gros !
Je vous épargne donc un surcroît de dépense.
J’attendrai pour mes vers une autre circonstance,
Un paquet, un courrier, ou bien l’occasion
D’un voyageur en soie en route pour Lyon ;
Et s’il met, cher cousin, les vers dans sa valise.
Au moins, je n’aurai pas la crainte qu’il les lise !


M. de Monlherot répond :

(Sans date).


Est-il vrai qu’à Berchoux Alphonse me préfère ?
Il m’assigne une place à côté de Voltaire !
De Voltaire ? C’est fort ! Mais l’éloge est joli :
Peut-on n’être pas vrai lorsqu’on est si poli ?
Vers fameusement faits !... Oh, l’aimable hémistiche !
De mon propre mérite il faut que je m’entiche :
Des vers ! des vers ! Je sens ma fièvre redoubler...
« Je t’en avais comblé, je veux t’en accabler ! »
Puissé-je être inspiré comme au quinze décembre !
C’est très douteux. J’écris aujourd’hui dans ma chambre...