Nous cherchons les temps morts, la parole envolée.
Seule ; une voix d’oiseau remplit l’air cristallin,
L’asphodèle fleurit sur la berge isolée
Et l’odeur d’immortelle embaume le chemin.
Dis-nous, dis-nous comment son âme a pris la tienne
Avant l’heure où tu vins, pâle et déjà chrétienne,
Ployant sous le fardeau des jours inexpiés,
Briser ton cœur immense et brûlant à ses pieds.
Près de ce même lac où vont les mêmes voiles
Etait-ce la douceur limpide du matin,
Etait-ce un de ces soirs effeuillant les étoiles
Le long du ciel, ainsi que des fleurs de jasmin ?
Ta litière suivait peut-être le chemin
Qui serpente vers les campagnes violettes ;
Ta litière aux rideaux sonores de clochettes
T’emportait, les yeux longs, meurtris par le fard bleu,
Fière dans le péché de tout l’orgueil hébreu.
Les femmes détournaient le front, les jeunes hommes
Venaient à toi : « Ta joue a le parfum des pommes,
O rose de Saron, vin puissant des celliers,
Le cœur fond en voyant palpiter tes colliers ! »
Et comme tu passais, dans ta grâce immobile,
L’homme de Nazareth revenait vers la ville,
Las d’avoir voyagé sous le jour écrasant.
Tu vis ses mains d’un Dieu qui s’est fait artisan,
Tu vis ses pieds poudreux des éternelles routes,
Son front où la sueur perlait à larges gouttes,
Et tes yeux ont croisé le regard infini……
Quelle voix dans ton être a crié : « Rabboni ? »
Quelle angoisse t’a fait trembler comme une palme ?
Ou bien, le soir, à l’heure où divinement calme
La lumière s’éteint sur le lac pâlissant,
Quand la flûte soupire aux lèvres du passant,
Du seuil de ta maison, vers les collines molles,
Tu vis se rassembler un peuple frémissant,
Champ fervent où tombait le grain des paraboles ;
Et le vent, et la foule emportait les paroles.
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