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C’était Punta del Este. Il changea alors de route et entra dans des eaux teintes de violet et de brun. C’était le Rio de la Plata, immense estuaire que la République Argentine borde au Sud, et l’Uruguay au Nord. Les deux capitales, Buenos-Airos sur la rive Sud, Montevideo sur la rive Nord, se font ainsi face, Buenos-Aires étant seulement plus enfoncé en amont.

Le bateau s’engagea dans une rade circulaire que dominait à gaucho un pilon conique. Adroite une ville s’étalait. C’était Montevideo, la capitale de l’Uruguay. Nous étions partis depuis vingt-six jours.


I. — LE CHARME DE MONTE VIDEO

Une ville, qui couvre de sa vaste étendue un terrain ondulé ; de larges et longues rues étroites, qui se coupent en équerre, et qui la traversent tout entière : au bout de chacune de ces rues, la lame obscure de la mer ; des maisons basses, très souvent sans étage, et couronnées par la balustrade d’une terrasse ; tout cela clairet aéré, avec beaucoup dévides ; des quartiers silencieux ; des avenues de platanes ; des places d’un dessin charmant, ombragées de palmiers, ornées de fontaines et dont le sol est couvert de sable rouge ; je ne sais quoi d’aimable et d’accueillant, où le regard se plaît : voilà Montevideo. Ce n’est pas, comme Buenos-Aires, une grande ville fiévreuse. Mais elle a gardé quelque chose de la grâce coloniale. Ces maisons basses et d’un joli style, cette verdure, ce silence, ces espaces sont un enchantement. Pour une population qui ne dépasse pas beaucoup 300 000 habitants, la ville a une superficie comparable à celle de Paris. Elle s’étend encore. D’immenses boulevards la prolongent dans la campagne.

C’est une ville d’été. À son extrémité Nord-Est s’étend une plage, devant laquelle on a construit un grand hôtel. Cet hôtel appartient à la ville, qui a logé une roulette dans une aile. Il y a là, dans les beaux jours, une animation incroyable. Les automobiles couvrent la large chaussée ; la plage regorge ; dans le hall de l’hôtel, les tables se touchent. On danse dans une vaste salle ; on donne dans une salle à manger des banquets de six cents couverts. De cette première plage une route nouvelle, le long de la mer, conduit à une seconde, celle de Pocitos, située à une petite lieue de la ville. Cette longue chaussée, entaillée dans