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ne tirent du traité aucun souffle vital et qui ne peuvent que s’évanouir devant la Société des Nations. Le vœu des habitants exprimé dans chaque commune, la situation géographique et économique des localités, voilà les seules lois qui doivent commander la solution finale.

Qu’on les respecte, la Pologne sera sauve ; qu’on les viole, la puissance militaire de l’Allemagne sera implicitement reconstituée. Laissons le Conseil de la Société des Nations méditer ce formidable sujet ; laissons-le compulser les dossiers, interroger les statistiques, rechercher au besoin les témoignages. Il ne manquera pas de documents pour s’éclairer. Pour avoir un aperçu de ce qui a déjà été publié sur la Haute-Silésie en Allemagne, en Pologne, en Angleterre, en France, en Italie, il n’est que de parcourir l’essai bibliographique inséré à la fin du numéro spécial qui vient de paraître dans les Archives de la Grande Guerre. Cette intéressante brochure contient une excellente étude politique de M. Noulens, sénateur, ambassadeur de France, Président de l’Association France-Pologne, une remarquable analyse démographique de M. Emile Bourgeois, un savant exposé économique de M. G. Bienaimé, un vivant récit du plébiscite par un témoin, M. le député Regaud, et, au milieu de diverses pièces officielles, des reproductions de tracts, d’affiches, de cartes postales qui nous édifient sur la vivacité de la lutte dont la Haute-Silésie est l’enjeu. C’est ainsi, par exemple, que sur une médaille allemande de propagande, frappée à l’effigie-de sainte Hedwige, nous lisons cette inscription : « Hauts-Silésiens, souvenez-vous ! C’est d’Allemagne que vous est venu le christianisme. » Dans l’histoire de Haute-Silésie, telle qu’il l’avait contée aux Communes, M. Lloyd George avait oublié ce chapitre-là. Il est vrai que Henri le Barbu, auquel a été mariée Hedwige, était, à la fois, duc de Silésie et de Pologne et que, par conséquent, la médaille aurait pu être distribuée par la Pologne mieux encore que par le Reich. Souhaitons, en tout cas, que, pour le 17 octobre, jour de la fête de sainte Hedwige, les Polonais de Haute-Silésie aient enfin la joie de célébrer leur délivrance.


RAYMOND POINCARE.

Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.