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SUR L’ESPACE ET LE TEMPS SELON EINSTEIN.

Mais en réalité l’expérience de Michelson est un peu plus compliquée que je ne viens de l’expliquer schématiquement et il importe d’y revenir. En fait, elle revient à disposer dans le laboratoire quatre miroirs équidistants et se faisant face deux à deux. Deux des miroirs opposés sont placés suivant la direction Est-Ouest, direction du mouvement de translation de la terre autour du soleil ; les deux autres sont placés suivant la direction perpendiculaire à la précédente, la direction Nord-Sud. On produit deux rayons lumineux se propageant respectivement suivant les directions des deux couples de miroirs. Les rayons provenant du miroir Est vont au miroir Ouest, sont réfléchis par lui et reviennent au miroir Est. Ce rayon est amené à coïncider avec le rayon qui a fait le trajet aller et retour entre les miroirs Nord-Sud ; il interfère avec lui en produisant des franges d’interférences, qui, ainsi que je l’ai expliqué, permettent de connaître exactement la différence des trajets parcourus par les deux rayons entre les miroirs. S’il se produisait, une variation de la différence entre ces deux distances, on verrait immédiatement se déplacer un certain nombre des franges, d’interférences, ce qui fournirait la grandeur de cette variation.

Et maintenant une analogie va nous faire comprendre ce qui se passe : supposons qu’un vent violent et régulier Est-Ouest souffle au-dessus de Paris et qu’un avion se propose de faire le trajet d’Auteuil à Charenton et retour sans escale, c’est-à-dire contre le vent à l’aller et avec le vent en poupe au retour. 12 kilomètres séparent Auteuil de Charenton. Supposons qu’en même temps un autre avion identique au premier se propose de franchir, en partant également d’Auteuil, un trajet aller et retour entre Auteuil et un point situé à 12 kilomètres au Nord. De la sorte, ce deuxième avion aura, à l’aller comme au retour, un trajet perpendiculaire à la direction du vent. Ces deux avions étant supposés partir en même temps et faire demi-tour instantanément, seront-ils de retour en même temps à Auteuil, et sinon, quel est celui qui aura fini son double parcours le premier ?

S’il n’y avait pas de vent, il est clair que les deux avions seraient de retour en même temps puisqu’ils parcourent tous deux 24 kilomètres à la même vitesse, que je suppose, pour fixer les idées, de 200 mètres à la seconde.

Mais il n’en sera plus de même s’il y a du vent soufflant