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REVUE. — CHRONIQUE.

publié, les premiers ministres de l’Empire n’ont pas caché leur déception. Dans l’affaire de Haute-Silésie, c’est, au contraire, l’esprit de M. Lloyd George qui a prévalu. Non certes que le chef du Gouvernement britannique n’ait rencontré, avant de faire triompher sa thèse, une grande résistance chez ses collègues. Le général Smuts s’est, au contraire, empressé de recommander à l’Angleterre d’en revenir à la tradition du splendide isolement et, si le premier ministre néo-zélandais, l’honorable M. W.-F. Massey, a, en revanche, fermement répondu que l’Empire britannique ne pouvait se désintéresser de la sécurité de la France et avait l’obligation, au moins morale, de l’assister en cas d’agression nouvelle, il n’en reste pas moins que Benthen, Gleiwitz et Kattowitz sont un peu loin de Wellington et que nous ne saurions attendre de jeunes républiques, nées et grandies aux antipodes, une vue toujours exacte des difficultés européennes. M. Lloyd George est donc venu à Paris, après s’être fait donner carte blanche par les Dominions dans l’affaire de Haute-Silésie, et alors est arrivé ce qui, depuis de longs mois, était devenu inévitable : la faillite du Conseil suprême. La faillite, ce n’est pas assez dire : le Conseil est mort, et il est mort comme il a vécu :

Moriva Argante e tal moria qual visse.

Dans un remarquable article, qui eût mérité d’être intégralement reproduit par la presse française, le Times a résumé la longue série des fautes qui ont rendu fatal ce douloureux échec de la dernière conférence de Paris, et il s’est rencontré avec moi dans les appréciations que je n’ai cessé de porter ici, depuis un an et demi, sur les nouvelles méthodes diplomatiques. Les événements n’ont, hélas ! que trop justifié l’opinion dont je me suis obstinément fait l’interprète.

De tous les problèmes qu’avait à résoudre le Conseil suprême, l’un des plus importants pour l’avenir était assurément celui des sanctions, l’un des plus urgents et des plus redoutables était celui de la Haute-Silésie. Les sanctions militaires ont été provisoirement maintenues ; les sanctions économiques ont été, en principe, supprimées pour le 1er  septembre. Premier recul. Quant à la question de Haute-Silésie, le Conseil ne l’a pas résolue ; il a pris une tangente pour ne pas accuser trop brutalement, devant le monde, les profondes divergences qui persistaient entre la France et l’Angleterre. Le renvoi au Conseil de la Société des Nations a eu l’avantage d’épargner aux « principales Puissances alliées » l’humiliation et le péril