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s’entretenant avec lui, aura vraisemblablement, comme le soldat juif qui refusait de l’arrêter, l’impression que « jamais homme n’a parlé comme cet homme-là. » Il serait, en tout cas, surprenant qu’il le pût haïr.

Certes, le prêtre catholique ne peut prétendre créer la foi, puisqu’il enseigne lui-même que la foi est une « grâce. » Mais il peut mettre le « Fils de l’homme » en communication avec ceux qui l’ignorent et leur inspirer ainsi la curiosité de savoir si ce personnage est vraiment le Dieu qu’il dit être, ou seulement quelque illuminé semi-imposteur.

Quelle que soit d’ailleurs l’Eglise de demain, il est aujourd’hui démontré que la confiscation des biens meubles et immeubles, séculiers et réguliers, la suppression du budget des cultes et le renvoi du clergé des logis qu’il occupait il y a quinze ans (évêchés ou presbytères) ne lui ont pas porté le préjudice que les uns espéraient et que redoutaient les autres.

Même son prosélytisme au dehors n’a pas souffert : élite et force du catholicisme mondial, fidèles et clergé français rayonnent dans l’univers : sur 8 millions de francs que recueille annuellement l’œuvre internationale de la Propagation de la Foi, la France en fournit 5 à elle seule ; et, parmi les missionnaires des deux sexes et de toutes nations morts l’an dernier sur la surface du globe à leur poste d’évangélisation, les trois cinquièmes, — 60 sur 100, — étaient des missionnaires français.

La France officielle pouvait, suivant qu’elle le jugeait ou non avantageux à notre pays, rétablir ou ne pas rétablir des relations protocolaires et galonnées avec ce que les hommes d’Etat de l’ancien régime nommaient la « Cour de Rome ; » la chose n’avait pas, au point de vue religieux, l’importance que quelques personnes se figurent. Ces uniformes et la diplomatie temporelle qu’ils représentent sont des ornements aussi accessoires du Vatican, que peuvent l’être la garde bariolée des Suisses ou la tiare aux trois couronnes sur la tête de celui qui, tenant la place de l’apôtre Pierre, a comme tel, au regard des catholiques, le pouvoir de lier et de délier dans le ciel.


GEORGES D’AVENEL.