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Tous ces titres, aussi bien les trente-huit milliards à émettre cette année, que les quatre-vingt-deux à émettre plus tard, seront, comme ceux de la première série, les seuls paiements que l’Allemagne effectuera entre nos mains. Quand elle nous remettra une obligation d’une valeur nominale de mille marks or, elle sera réellement libérée de mille marks or, mais, comme cette obligation ne nous rapportera que cinquante marks or, nous ne pourrons pas, en l’état actuel, en tirer nous-mêmes mille marks or et, pour ne pas subir de trop fortes pertes, nous aurons à nous débattre avec des financiers de tous pays.

Chose stupéfiante, cet état de paiements du 6 mai n’a pas été immédiatement compris par tous ceux qui y avaient collaboré, et le Président et le rapporteur général du Sénat, MM. Milliès-Lacroix et Chéron, pourraient, à cet égard, comme moi-même, raconter une anecdote piquante. Des interprètes un peu optimistes déclaraient, après la Conférence de Londres, qu’indépendamment des bons, les Alliés recevraient de l’Allemagne une partie des annuités payables en or. Il n’en est rien. La totalité des versements que doit opérer l’Allemagne, tant sur les annuités fixes que sur les annuités variables, doit être consacrée au service des intérêts et de l’amortissement des titres. Les paiements sont faits les 15 janvier, 15 avril, 15 juillet, 15 octobre, pour les annuités fixes de 2 milliards marks-or ; ils sont faits les 15 février, 15 mai, 15 août, 15 novembre, en ce qui concerne les annuités variables, qui doivent équivaloir à vingt-cinq pour cent des exportations allemandes ou représenter une valeur égale déterminée par d’autres indices. Qu’a donné, jusqu’ici, la vérification des exportations allemandes ? Qu’attend-on, pour cette année, de l’annuité variable ? Où en sommes-nous, au juste, pour l’annuité fixe de deux milliards elle-même qui devrait, y compris le premier milliard dont j’ai parlé plus haut, être intégralement payée avant le 15 octobre prochain ? J’ai bien peur que, pour les deux sortes d’annuités, nous ne restions exposés à de fâcheux mécomptes. Comment se peut-il qu’en présence de cette incertitude, le Gouvernement britannique ait cru devoir assurer, en dehors de nous et à notre insu, les ministres du Reich qu’il était disposé à les appuyer dans une demande de main-levée des sanctions ? Avons-nous vraiment, dès aujourd’hui, des preuves tangibles de la bonne volonté allemande ? C’est après qu’au mois de mars, le docteur Simons s’était permis à Londres, suivant le mot de M. Lloyd George, « un défi » et « une moquerie du traité, » que les Alliés ont occupé les villes de Duisbourg, Ruhrort et Dusseldorf et établi une ligne de postes douaniers sur le Rhin. L’Allemagne