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II de la partie VIII), d’amender plusieurs passages importants de cette annexe, et ils rédigeaient ensemble un protocole, pour donner pouvoir à la Commission des Réparations de modifier le type, l’intérêt et l’amortissement des bons prévus au traité, d’affecter au service de ces bons « certains revenus et avoirs à déterminer, » et de désigner une sous-commission de garanties qui surveillerait l’application des revenus assignés. Ces dernières dispositions étaient, du reste, totalement superflues. Le traité donnait déjà le droit à la Commission d’affecter les revenus allemands au paiement de la dette et, comme le protocole du 5 mai portait : « Le comité de garanties ne sera pas autorisé à intervenir dans l’Administration allemande, » il n’ajoutait pas sur ce point un iota aux clauses de Versailles. En revanche, les nouveaux pouvoirs que le Conseil suprême affectait ainsi de conférer à la Commission produisirent immédiatement un effet singulier. Le lendemain 6 mai, la Commission, rentrée à Paris par les voies les plus rapides, promulguait un état de paiements, qui était bien le document le plus étrange qu’on pût imaginer et qui avait pour effet d’offrir à l’Allemagne, par rapport à la dette théorique de cent trente-deux milliards, les concessions les moins justifiables.

Le milliard de marks or qui avait été réclamé au Reich et qu’on lui avait enjoint de verser à la Banque de France, on lui donne pour le payer vingt-cinq jours de délai à partir du 6 mai ; ce n’est pas tout ; s’il ne plaît pas à l’Allemagne de verser ce milliard en or, eh bien ! qu’à cela ne tienne, elle le paiera en devises étrangères, ou même, si elle le préfère, en traites sur l’étranger, ou même encore, si tel est son bon plaisir, en effets à trois mois sur le trésor allemand, avalisés par des banques allemandes. L’Allemagne a naturellement choisi ce dernier mode de libération et, le 30 mai, elle a remis à la Commission des bons sur la valeur juridique desquels il y aurait beaucoup à dire. Mais ce qui est tout à fait inexplicable, c’est que la Commission, qui n’avait cessé de réclamer, depuis le mois de mars, le versement immédiat de ce milliard, change tout à coup d’attitude après son voyage à Londres et après ses conférences avec les Premiers ministres alliés. Non seulement elle accorde des termes nouveaux, mais elle ajoute que cette remise de bons, destinée à remplacer le milliard arriéré, sera considérée comme constituant, pour 1921, les deux premiers versements trimestriels de l’annuité fixe de deux milliards de marks or. Autrement dit, l’Allemagne, au lieu de payer en 1921, comme les années prochaines, une annuité de deux milliards, et, en