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M. Boyden, délégué officieux des États-Unis, ont eux-mêmes, l’un et l’autre, mis en lumière le caractère extrêmement modéré de cette évaluation, dans les discours qu’ils ont prononcés, le 10 mai, lorsque le représentant américain a repris, après une courte absence, sa place à la Commission. L’estimation, si basse qu’elle fût, avait, du moins, l’avantage d’avoir été arrêtée à l’unanimité. En outre, dans la lettre envoyée, le 28 avril, à la Kriegslastenkommission, MM. Louis Dubois, Salvago Raggi, Delacroix et sir John Bradbury avaient pris soin de préciser que la somme de 132 milliards ne comprenait pas les restitutions, en nature ou en espèces, de machines, d’animaux, d’objets ou de valeurs, enlevés, saisis ou séquestrés. Ils avaient ajouté que les sommes empruntées, avant le 11 novembre 1918, par la Belgique aux gouvernements alliés et associés, et remboursables par l’Allemagne en vertu de l’article 232 du Traité, resteraient également en dehors des 132 milliards. Le 1er mai 1921, les Alliés étaient donc autorisés à penser que, s’il leur était imposé de lourds sacrifices sur leur créance, ils toucheraient, indépendamment des restitutions et des remboursements à la Belgique, un minimum de 132 milliards.

D’autre part, on se rappelle qu’aux termes de l’article 235 du traité de Versailles, l’Allemagne était obligée de payer, avant cette même date du 1er mai 1921, un premier acompte de vingt milliards de marks or, sur lesquels devaient être imputés les frais des armées d’occupation et les sommes avancées pour fourniture de vivres et de matières premières à l’Allemagne. Tenant compte des prestations diverses opérées par l’Allemagne depuis l’armistice, la Commission des Réparations avait constaté qu’il était redû au moins, sur les vingt milliards, douze milliards de marks or. Dès le 15 mars, elle avait signalé ce déficit à la Kriegslastenkommission ; elle avait rappelé à l’Allemagne son obligation de le combler avant le 1er mai, et, de plus, elle avait demandé, à titre de premier acompte, le paiement de un milliard de marks or avant le 23 mars. La veille du jour où cette somme devait être versée, la Kriegslastenkommission répondit à la Commission des Réparations par une simple fin de non-recevoir. Le 24 mars, la Commission des Réparations, s’acquittant de son devoir, signifia, en termes catégoriques, au gouvernement du Reich, qu’il avait manqué à une des obligations que lui imposait le Traité. Le même jour, une notification de ce manquement fut envoyée par la Commission à chacune des Puissances intéressées, conformément aux stipulations du Traité (paragraphe 17 de l’annexe II de la partie VIII). Par suite de cette notification,