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Bons, comment les utiliser, et sur quel marché, pour les transformer en argent comptant ? C’est là toute la question.

Voici la réponse américaine : M. F.-O. Watts et M. George Roberts se sont trouvés d’accord pour déclarer que si les États-Unis ont considéré avec satisfaction l’engagement de payer pris par l’Allemagne, en revanche, ils ont accueilli, avec la plus grande réserve, le projet, venu de divers pays, en vue d’offrir sur le marché américain les Bons de réparation créés en représentation de cet engagement [1].

Suivant l’opinion des deux délégués, ces Bons ne doivent pas être émis trop hâtivement, c’est-à-dire tant que l’on n’aura pas expérimenté, sur ce point, la capacité de paiement de l’Allemagne. Il ne faut pas oublier, en effet, que ce débiteur ne peut payer qu’avec le produit de ses exportations, et qu’il importe que celles-ci ne viennent pas encombrer le marché des autres pays, ou concurrencer leurs propres exportations, et c’est là une considération qui parait primer toutes les autres pour les Etats-Unis. En tout cas, ces Bons ne devraient être utilisés que comme garantie pour des emprunts émis directement par les Etats intéressés.

Il est cependant une circonstance dans laquelle les Etats-Unis sembleraient disposés à recevoir ces Bons avec faveur : c’est, par exemple, s’ils étaient remis en paiement pour des achats de matériaux de construction faits à l’industrie américaine, en vue de la reconstitution des régions dévastées. Telle est la formule qui concilierait le mieux la sympathie et l’intérêt américains.

En résumé, le problème entier reste à résoudre et nous savons d’ailleurs, par des voix très autorisées, que le marché des États-Unis, qui est lui-même aux prises avec de grandes difficultés d’ordre économique et financier, ne peut accueillir avec empressement une opération de mobilisation de Bons allemands, alors surtout que l’opinion américaine est si peu préparée à souscrire à des placements étrangers.

Mais c’est là une situation qui peut se modifier assez rapidement, si l’on arrive à créer, comme l’a dit à juste titre le lord

  1. D’après M. George Roberts, le marché américain aurait absorbé, en 1921, environ 15 milliards de dollars de valeurs nationales, alors que, pour les titres étrangers, le chiffre est à peine de un milliard, ce qui tend bien à démontrer que le public aux États-Unis est encore très peu préparé pour cet ordre de placements.