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de la Commune, son hostilité contre la Convention, les massacres de septembre, la chute des Girondins et la Terreur. Pour les Mareux, il n’y avait pas de doute que l’initiative fût venue du côté des Royalistes et que les Jacobins eussent sauvé Paris d’un massacre prémédité.

C’est le 24 juillet que furent élus, dans les 48 sections de Paris, les premiers éléments de la Commune révolutionnaire. Le lendemain, l’Assemblée nationale, en décrétant la permanence des sections, organisait 48 clubs constamment ouverts aux péroreurs, 48 foyers d’agitation. Dès lors, dans toutes ces sections, la lutte s’engage ; d’abord à coups de langue. Suivant les heures, on y prend des décisions contradictoires, on juge et on se déjuge. Les majorités sont flottantes. Mais, par l’évolution ordinaire aux assemblées populaires que dominent toujours les minorités violentes, un mouvement progressif s’opère dans le sens de ce qu’on appellerait aujourd’hui le bolchévisme.

Particulièrement à la section modérée dont fait partie Mareux, celle du roi de Sicile, dans le calme quartier du Marais, un jour on vote la déchéance du Roi, le lendemain on proteste en sa faveur. Enfin, le soir du 9 août, sur un mot d’ordre jacobin venu du faubourg Saint-Antoine, le mouvement gagne le Marais : partout le tocsin sonne, les rues s’éclairent, les fédérés se rassemblent. Un bruit court que les royalistes se préparent à égorger les patriotes... « Plusieurs jours avant, écrit Adélaïde Mareux encore toute tremblante, nous étions avertis, mais n’étions pas trop effrayés. Le jour indiqué arrive donc et nous fait voir que la réalité du fait n’est que trop confirmée. Le jeudi 9, sur les sept ou huit heures du soir, chacun se disait en silence de veiller la nuit et de ne pas se coucher et de se tenir sur ses gardes ; car tout bon citoyen y était intéressé. Sur les onze heures et demie du soir, jusqu’à minuit, l’alarme s’est répandue par tout Paris, criant de tous côtés, frappant aux portes ; le tocsin mêlé partout. Juge de la situation de tout le monde. Les citoyens sont donc obligés de se lever ; les uns vont à ieur section, les autres suivent le torrent qui les conduit vers le château des Tuileries, et sans commandement... Le bourgeois de la maison [1] va à la section, sur les minuit. N’ayant pas d’armes, impossible pour

  1. C’est son père, Toussaint Mareux, qu’elle désigne ainsi.