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Il mourut à soixante-neuf ans, perdu de crapule, d’ivrognerie et de mangeaille.

La Fontaine demeura le plus fidèle et le plus tendre des amis de la convertie. De son affection il a donné des preuves touchantes. Le plus émouvant de ces témoignages est l’admirable épitre qu’il lut à la fin de la séance où il fut reçu académicien.

Ce jour-là il lit sa confession publique, étrange confession, sans ferme propos de ne plus pécher, mélancolique et souriant aveu de son inguérissable faiblesse, le plus beau commentaire qu’un poète ait jamais donné de l’éternel video meliora probogue, deteriora sequor.

Il n’ignore pas que sa Muse, aussi bien que ses jours,


Touche de son déclin l’inévitable cours.


Il sait


Que le plus beau couchant est voisin de la nuit.


Il sait que le temps passe : d’un regard, il embrasse sa vie écoulée et il s’accuse de toutes ces passions dont il se glorifiait autrefois dans l’Hymne à la Volupté. Et cependant réparer, expier, comme l’a fait son amie pénitente, il n’en a point le courage.


Si j’étois sage, Iris...


Iris ! jamais il ne cessera de donner ce sobriquet mythologique à celle qui, maintenant, n’est plus qu’une garde-malade occupée à veiller, consoler et ensevelir les misérables.


Si j’étois sage, Iris (mais c’est un privilège
Que la nature accorde à bien peu d’entre nous),
Si j’avois un esprit aussi réglé que vous,
Je suivrois vos leçons, au moins en quelque chose :
Les suivre en tout, c’est trop...
………..
Ne point errer est chose au-dessus de mes forces.


Il entend une voix qui lui reproche


L’inconstance d’une âme en ses plaisirs légère,
Inquiète, et partout hôtesse passagère.


Voix indulgente qui lui pardonne tous les caprices, toutes les imaginations, pourvu qu’il renonce à écrire des contes. Il est sur le point d’écouler la bonne conseillère.


J’ai presque envie, Iris, de suivre cette voix.