Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 64.djvu/854

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cimentée et qui a fauché cent dix ecclésiastiques de ce diocèse, beaucoup de jeunes vicaires de ces paroisses suburbaines ou des quartiers excentriques sont morts à l’ennemi, depuis ceux de Plaisance et du Perreux en août 1914 jusqu’à celui de Sainte-Geneviève des Grandes-Carrières, adjudant d’infanterie, deux fois cité à l’ordre du corps d’armée, qui fut tué en octobre 1918. Le curé de cette même paroisse, mobilisé lui aussi, envoyait des premières lignes, où lui aussi fut plusieurs fois cité pour sa bravoure, de pressants appels à la charité en faveur de ses œuvres parisiennes.

Ces apostolats, depuis quinze ans, n’ont pas été interrompus : à Saint-Joseph des Quatre-Routes, parmi les chiffonniers, entre Colombes et Asnières ; à Pavillon-sous-Bois, sur l’emplacement de l’ancienne forêt de Bondy, où le prêtre commença par dire la messe devant un autel dressé dans sa salle à manger ; à Villeneuve-la-Garenne, où il la célébra durant neuf mois (1913) dans le salon du presbytère. Ici, après avoir peu à peu abattu les cloisons des pièces voisines pour recevoir les assistants, il installa son « église » dans une ancienne teinturerie, aux murs tachés, aux vitres dépolies par la poussière, son patronage des garçons dans un hangar, celui des filles dans une écurie, où l’on voyait encore les mangeoires. Là aussi le curé se servit de « conférences avec projections, » pour aider le dimanche, dans un grenier, à l’enseignement du catéchisme.

Quand l’abbé Fontaine, l’ami de Huysmans qui l’assista dans sa dernière maladie, débarqua à Clichy, personne le dimanche n’assistait à sa messe ; aujourd’hui, l’église, agrandie, ne désemplit pas. Quand fut instituée une messe réservée aux hommes, il en vint trois ; le dimanche suivant, il n’y en avait qu’un ; il informa le curé de n’avoir plus à se déranger. Aujourd’hui, une nombreuse confrérie du Saint-Sacrement se rassemble aux offices paroissiaux. La moisson d’âmes est plus ou moins abondante, elle est plus ou moins lente à mûrir, suivant la nature de la population ; mais partout où le prêtre vient au peuple, la main tendue, le cœur ouvert, sans aucune arrière-pensée politique surtout, pour se dévouer à son service au nom du Dieu vivant dont il lui découvre l’existence, le peuple écoute cet homme avec surprise, puis avec sympathie, et bientôt avec confiance.