Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 64.djvu/837

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Constantin, dans son édit de 313, était un régime analogue à la séparation inaugurée en 1905 ; à cette nuance près qu’au lieu de confisquer les biens de l’Église, pour la punir de n’avoir pas voulu se laisser organiser par la loi civile, comme fit le législateur il y a quinze ans, le pouvoir du IVe siècle débutait par une restitution des propriétés cultuelles ou autres précédemment dérobées.

« Nous avons décidé, disait la circulaire impériale, que non seulement leurs lieux de réunion, mais tous autres biens que les corporations chrétiennes possédaient, si quelques-uns d’entre eux ont été achetés par notre lise ou par qui que ce soit, on les rende aux conventicules chrétiens gratis, et sans chercher des prétextes ou soulever des ambiguïtés. » Une autre liberté octroyée au IVe siècle, non maintenue au XXe siècle, était celle de tester en faveur des églises. Il fut interdit aux juifs, sous peine du feu, de lapider ceux d’entre eux qui se convertiraient au christianisme ; mais le pouvoir demeurait impartial entre les différents cultes : « Nous voulons, disait l’Empereur, que tous aient la même liberté de leurs religions et observances, ainsi que l’exige la paix de notre temps, pour que chacun ait libre faculté d’adorer ce qui lui plaît. »

Seulement, ce régime de neutralité parfaite dura peu : une vingtaine d’années à peine ; après lesquelles l’État romain se mit à proscrire plus ou moins délibérément le paganisme ; les temples restèrent ouverts, mais les fonctionnaires furent dés lors choisis en majeure partie parmi les chrétiens ; à ceux qui étaient païens, il fut défendu de prendre part officiellement aux cérémonies de leur culte, — prohibition que l’on a vu se reproduire, en des temps modernes, contre les chrétiens.

« Puisque l’erreur lamentable résiste encore avec trop de force chez quelques-uns, disait le prince, qu’ils gardent, s’ils le veulent, les temples du mensonge. » Précaire et provisoire fut d’ailleurs cette liberté des païens. Comme l’État avait cessé de faire les frais des sacrifices, les collèges sacrés et les sacerdoces se recrutaient avec difficulté ; puis les prêtres furent dépouillés de leurs traitements et les temples de leurs revenus propres ; il fut interdit d’élever des idoles, de pratiquer la divination et de sacrifier sous peine de mort. Enfin, les temples furent fermés ou démolis et tout exercice de l’ancien culte extirpé à coups de rescrits impériaux.