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le Chemin des Dames, franchirent l’Aisne, la Vesle, et poussèrent jusqu’à la Marne. « Profondément affligé par ces douloureux événements, » le général de Castelnau n’en gardait pas moins tout son espoir et toute sa confiance de chrétien et de soldat français. Il restait convaincu que, si l’on revenait aux vrais principes de la guerre, c’est-à-dire à la manœuvre, trop négligée pendant les combats de tranchées, elle finirait par nous donner la victoire. Il observait que les offensives allemandes, heureusement dispersées dans l’espace, Tétaient aussi dans le temps, ce qui dénotait une usure des forces ennemies probablement plus considérable que nous ne le soupçonnions nous-mêmes. Enfin, il s’appliquait à mettre tout ce qu’il avait d’expérience et de sagacité au service du commandement allié. Justement, au début de juillet, un renseignement sûr, d’origine alsacienne, arrivait par la Suisse à Belfort, dans ce service d’informations que dirigeait supérieurement le commandant Andlauer. L’armée Gouraud, aussitôt alertée, prend toutes ses dispositions pour recevoir comme il convient l’offensive allemande. Et ce fut la victoire défensive du 15 juillet, prélude de la grande bataille où, sous les coups ininterrompus de Foch, va sombrer enfin la fortune des armées impériales.

A cette grande bataille, le groupe des armées de l’Est, longtemps passives, devait collaborer par une puissante offensive qui, prévue pour le 13 novembre, était destinée à donner à l’Allemand le « coup de massue » final. Il s’agissait de « faire sauter le pivot » de la résistance germanique, et, en marchant sur Sarrebrück, puis Cologne, de couper à l’ennemi ses lignes de retraite. Dès le 20 octobre, le maréchal Foch écrit au général l’étain pour l’engager à préparer cette opération que, de son côté, le général de Castelnau juge « grosse de conséquences heureuses. » Tous deux vont s’appliquer à en mettre au point tous les détails avec leur précision et leur conscience habituelles. Les armées de l’Est n’ont devant elles que cinq à six divisions médiocres, fatiguées, démoralisées par la défaite : comment ces troupes pourront-elles supporter le choc des vingt divisions alliées qu’on va lancer contre elles ? De ces vingt divisions, c’est le général Mangin qui recevra la plus large part : il a quitté secrètement, vers la fin d’octobre, le front de la Serre, avec son armée, pour se mettre à la disposition du général de Castelnau. Celui-ci a demandé et obtenu que le général