avec lui. Au contraire, en l’attaquant du fort au faible, avec tous les moyens d’offensive dont nous disposions, les Anglais et nous, nous le forcerions à lâcher sa proie pour se défendre à son tour, et, à défaut d’une « percée, » toujours problématique dans l’état actuel de nos ressources, nous lui infligerions une usure matérielle et morale dont nous finirions bien, un jour ou l’autre, par recueillir les résultats. Cette conception finit par l’emporter sur les conceptions contraires ; et, adoptée par les Anglais, elle aboutit à la bataille de la Somme.
Préparée, tant du côté anglais que du nôtre, avec une extrême minutie, cette bataille de la Somme a été, à partir du mois de mai 1916, l’une des grandes préoccupations du général de Castelnau. Celui-ci estimait qu’il était indispensable, pour bien des raisons, que l’armée française participât à cette opération ; si affaiblie qu’elle fût par ses pertes de Verdun, elle aurait pour mission d’appuyer la jeune armée anglaise, dans une mesure que l’état dernier de ses effectifs déterminerait. Mais pour cela, il fallait que Verdun n’absorbât pas toutes les disponibilités, et, en dépit des précautions prises, il arrivait trop souvent que les forces françaises fondaient avec une inquiétante rapidité dans la terrible fournaise de Verdun. L’Empereur avait déclaré que le prestige de l’armée allemande était attaché à la prise de la place, et quoique la bataille lui coûtât bien cher, — plus de 400 000 hommes, — il était déterminé à en sacrifier, s’il le fallait, 300 000 encore pour en venir à ses fins. Et il agissait en conséquence. Il fallait résister à coup d’hommes, nos moyens matériels étant inférieurs, aux furieux assauts de l’infanterie allemande, et, à ce jeu, nos divisions s’usaient effroyablement. Enfin, l’on put en économiser une douzaine pour l’offensive de la Somme. Elles furent placées sous le commandement du général Foch, et l’offensive franco-anglaise se déclencha le 1er juillet.
Cette offensive, dont les résultats réels n’apparaîtront que beaucoup plus tard, lors de la fameuse retraite allemande sur la ligne Hindenburg, a-t-elle été conduite avec toute la méthode et l’audace manœuvrière qu’on aurait pu souhaiter ? Les Allemands, nous l’avons su depuis par notre service de renseignements,