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commune, les Traités de Trianon et de Neuilly ; et elles prennent leurs dispositions pour empêcher la Bulgarie et la Hongrie de remettre en question « l’ordre » établi : « Article premier. En cas d’attaque non provoquée de la Hongrie ou de la Bulgarie, ou de ces deux Puissances contre une des parties contractantes, en vue de détruire l’ordre créé par le Traité de Trianon ou celui de Neuilly, l’autre partie s’engage à concourir à la défense de la partie attaquée. » Il s’agit, on le voit, d’une convention purement défensive, dont l’unique objet est le maintien des traités. La seule pomme de discorde qui divisât la Roumanie et le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes, a disparu ; le Banat ne donnera plus lieu à ces regrettables querelles qui ont failli, en 1919, séparer à jamais les deux peuples. Non seulement les relations de bon voisinage sont rétablies, mais un pacte d’amitié est conclu avec les meilleures chances de durée. Où MM. de Monzie et de Lamarzelle redoutaient l’obscurité et le désordre, voilà donc que les États successeurs de l’Autriche-Hongrie s’emploient à mettre eux-mêmes peu à peu de « l’ordre » et de la clarté. Ne nous désintéressons pas de leur œuvre ; elle nous concerne presque autant qu’eux.

Reste, il est vrai, un problème dont a plus particulièrement parlé M. de Monzie et qui ne risque par d’opposer nos alliés les uns aux autres. Comme l’a remarqué M. Briand, il a été posé, d’ailleurs, par le Traité de Saint-Germain, et non par le Traité de Trianon. C’est celui des Comitats occidentaux de la Hongrie. Ils doivent passer à l’Autriche. M. de Monzie a cité, à ce sujet, un vigoureux réquisitoire de M. Eugène Lautier : « Je ne comprendrai jamais par quelle aberration les négociateurs des différents traités de paix ont pu concevoir le projet monstrueux d’enlever à la Hongrie des territoires qui sont hongrois depuis mille ans, pour les donner à l’Autriche. Cette conception donne le vertige par la profondeur de sa stupidité. » « Cette population hongroise, a dit M. de Monzie, est tellement exaspérée par la menace qui pèse sur elle qu’elle a déclaré que, si on la détachait par la force de la Hongrie, elle voulait être allemande, et non autrichienne. » A quoi M. Briand a riposté : « Si les habitants sont animés de tels sentiments, nous n’avons guère à compter nous-mêmes sur leur amitié. » Mais il faut reconnaître que le gouvernement hongrois a fait, ces jours derniers, une remarque exacte à la Conférence des ambassadeurs, lorsqu’il a indiqué que les traités ne fixaient point de terme obligatoire pour la cession des Comitats. Il n’y a donc aucune bonne raison de précipiter, en ce moment, les choses. C’est le cas, ou jamais, d’appliquer la devise favorite de nos