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de lui et on le porta, pour ainsi dire, jusque dans ses appartements, sans que ses pieds pussent toucher les degrés de l’escalier. Il était neuf heures environ.

L’Empereur hors de sa voiture, je la remis en mains sûres et je cherchai a suivre Sa Majesté ; mais je dus y renoncer ; il n’y avait pas moyen de se faire passage. Sans perdre de temps, je montai l’escalier du pavillon de Flore et j’arrivai plus facilement au salon des petits officiers et pénétrai ensuite dans celui des grands officiers où l’Empereur était à table avec quelques personnes, parmi lesquelles étaient le Grand-Maréchal, le duc de Vicence, peut-être le général Drouot. Autour se tenaient debout des chambellans, des écuyers, des généraux, des colonels et beaucoup d’autres personnes, tant du civil que du militaire.

Le diner était servi comme si l’Empereur n’avait pas quitté les Tuileries. Aucune des personnes de service ne manquait : le contrôleur, M. Colin, le maître d’hôtel, Dunan, le tranchant, l’officier, les huissiers, les valets de chambre d’appartement, les valets de pied, tous étaient à leur poste ; toute la différence c’est que la plupart étaient en habit bourgeois.

Pendant son repas, l’Empereur s’entretint avec les uns et les autres de ceux qui l’entouraient, et souvent parlant à tous et racontant ce qui s’était passé dans son voyage depuis l’Ile d’Elbe, etc. Le diner terminé, il se leva de table, salua tous les assistants et passa dans le salon, accompagné du Grand-Maréchal, du Grand-Ecuyer, et de quelques autres personnes intimes. Peu après, la foule qui avait encombré les salons, l’escalier, s’étant dissipée, le calme régna dans l’intérieur du palais comme par le passé

Je ne dirai pas l’accueil que l’Empereur reçut à Paris de la part de la population. Il fut le même qu’à Grenoble, Lyon, et dans toutes les villes et villages par lesquels il avait passé. L’histoire des temps anciens et des temps modernes n’offre rien de si extraordinaire, de si merveilleux, que les événements qui venaient de se dérouler dans un espace de temps si peu considérable ; c’était une des admirables parties du grand règne de Napoléon.


SAINT-DENIS.