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Le tableau change du tout au tout lorsque cet assaillant est notre unité nouvelle à éperon horizontal.

Comme je le disais plus haut : ce n’est plus d’un choc perpendiculaire sur le flanc de l’adversaire qu’il s’agit, mais d’un contact qui, aussi oblique qu’on le suppose, n’en déchirera pas moins la coque plongée du navire atteint, et le paralysera pour longtemps s’il ne le coule pas sur place.

La seule condition de réussite d’un tel coup est évidemment, — notre unité étant, par hypothèse, manœuvrée avec habileté, commandée avec vigueur et décision, — que la vitesse de l’assaillant soit sensiblement supérieure à celle du navire attaqué. Et sans doute on ne peut pas affirmer, a priori, que le nôtre aura cette supériorité de marche. Je reconnaîtrai même qu’à moins d’augmenter son déplacement de 3 à 4 000 tonnes, il est probable que les grands « croiseurs de bataille » le primeraient, à la condition, toutefois, qu’au moment de l’attaque à fond, ils fussent eux-mêmes en pleine possession de toute leur vitesse. Or, je le répète et m’excuse d’y insister, le bâtiment proposé est un engin de surprise. En plein jour, c’est-à-dire dans les circonstances défavorables pour lui, il apparaîtra soudainement à la surface de la mer à une distance telle qu’il la puisse rapidement franchir sous le feu de l’adversaire qu’il attaque, telle aussi que ce dernier, marchant le plus souvent à vitesse réduite ou moyenne, n’ait pas le temps de passer à sa pleine « allure vive. » Il faut un bon moment à ces énormes masses pour prendre toute leur vitesse...

La nuit, en tout cas, pour peu qu’elle soit bien combinée, la surprise sera complète et le succès des plus probables pour l’attaque oblique à l’éperon horizontal, — ce qui, bien entendu, n’empêchera pas d’user, vis-à-vis de l’adversaire, des torpilles de l’avant, ainsi que des obus à grande capacité de l’obusier monstre.

Ne disons rien de l’attaque au mouillage. Il est évident que, là, l’effet de surprise aurait son rendement maximum. Il faudrait seulement qu’au préalable la route de notre unité de combat eût été draguée ou au moins reconnue par des sous-marins spéciaux, de peur des mines que la flotte ennemie aura disposées peut-être en avant de son ancrage. Quant aux obstructions, voire aux filets, notre bâtiment n’en aura cure. Sa masse, d’une part, certaines dispositions particulières pour ses hélices, de l’autre, lui permettront de passer outre.