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à ce bâtiment, dont l’armement essentiel est, visiblement, constitué par la torpille automobile, une bouche à feu de très gros calibre, pièce courte, énorme obusier, lançant des projectiles très fortement chargés en explosif et destinée à agir dans des circonstances spéciales ?

Examinons cela.

Quelles sont, d’abord, les circonstances que nous visons ici ?

J’ai dit déjà que l’armement de la nouvelle unité comportait un éperon d’un genre particulier, l’éperon horizontal [1], dont nous déterminerons précisément le rôle tout à l’heure. Quelles que soient les modalités de la mise en jeu de cette dernière arme, — arme de contact, — trop longtemps négligée, il est clair que son emploi suppose que notre bâtiment, après avoir exécuté sous l’eau une bonne partie de sa « marche d’approche, » émerge et se dirige, en surface, à son allure maxima (ou en demi-plongée, avec, naturellement, une vitesse un peu moindre), droit sur le grand cuirassé qu’il prétend attaquer. Dans ces conditions, plus il se rapproche, plus devient justifiée l’action de la grosse pièce, plus efficace devient son intervention, avant l’attaque à l’éperon et même après l’attaque à l’éperon, si celle-ci ne réussit pas. Une grande partie des œuvres mortes de l’adversaire peuvent être détruites, le blockhaus de commandement paralysé, ainsi que les « passages » de munitions des œuvres de gros calibre au voisinage des points d’impact des obus-torpilles de notre gros obusier. Peut-être même l’un de ces projectiles atteindra-t-il les soutes, par les monte-charges ; et alors c’est la catastrophe de la Queen Mary, le grand croiseur de combat anglais à la bataille du Jutland

Mais tout cela, c’est affaire de poids disponible. Les 750 tonnes ne suffiraient pas ; et il faudrait quelques centaines de tonnes de plus. Peut-être les trouverions-nous dans les 38 pour 100 attribués, il y a vingt-cinq ans, à la coque du croiseur de large... 38 pour 100, en effet, c’est beaucoup. Il est vrai que si ce croiseur, peu cuirassé, était très soigneusement compartimenté et « cellule, » si je puis créer ce mot, notre nouvelle unité de

  1. Au moment où j’établissais l’avant-projet du bâtiment qui nous occupe, j’ignorais que l’éminent ingénieur Laubeuf avait déjà proposé l’éperon horizontal. dont on verra plus loin la description. J’ai été, en tout cas, très heureux de cette rencontre avec le créateur du type si intéressant des submersibles.