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(Chili), la division anglaise du contre-amiral Craddock, après quoi il a franchi le détroit de Magellan et se dirige sur les îles Malouines (ou Falkland), possession anglaise qu’il compte surprendre et où il se ravitaillera, rendez-vous y étant donné à deux vapeurs charbonniers, le Baden et le Santa Isabel.

L’Amirauté anglaise a su deviner les mouvements de l’adversaire qu’elle veut, à tout prix, détruire à son tour. Elle confie au vice-amiral Sturdee deux croiseurs de bataille, trois croiseurs cuirassés et un croiseur auxiliaire, c’est-à-dire une force trois fois supérieure à celle de von Spee. Ces bâtiments appareillent de Plymouth le 11 novembre — dix jours à peine après le désastre de Coronel — suivent jusqu’aux Falkland, à bonne vitesse (ravitaillements à la mer), des routes peu fréquentées et arrivent, le 7 décembre au soir, à leur destination.

Le lendemain, 8, vers neuf heures du matin, la vigie de Sapper Hill signale l’approche des navires allemands. Les anglais appareillent aussitôt, se portent au-devant de l’ennemi, complètement surpris et qui essaie vainement de se dérober. En moins de deux heures la division von Spee est détruite, après une résistance des plus honorables. L’amiral allemand, ses officiers, ses équipages ont refusé de se rendre.

Rarement résultat plus décisif n’a couronné une opération mieux conçue, ni mieux conduite. Rarement, dis-je, et pourtant il faut bien reconnaître que la Fortune de la guerre n’est point si capricieuse. Elle punit toujours toutes les fautes et récompense le plus souvent les conceptions judicieuses exactement réalisées.

Mais pour obtenir justement cette exacte réalisation, il faut des instruments appropriés. Les croiseurs employés par l’amirauté, — les croiseurs de combat, surtout, bâtiments puissants et rapides à la fois, — convenaient parfaitement à la mission qui leur était confiée. Des bâtiments légers de surface, quel que fût leur nombre, y auraient-ils été aussi bien adaptés ? Il est permis d’en douter, quand on sait combien il était difficile, en 1914, d’obtenir de ces navires — petits croiseurs et « destroyers » — autonomie et endurance. Quant aux navires de plongée, il aurait certainement fallu les remorquer pendant la plus grande partie du trajet. Ne disons rien des appareils aériens, encore dans l’enfance, on peut l’affirmer, à l’automne de 1914.

En définitive, une force navale composée de ces divers éléments