Au moment où l’Empereur paraissait, c’étaient de toutes parts des acclamations ; tout le monde se mettait en mouvement ; chacun se haussait de son mieux pour l’apercevoir. D’abord ce fut de la simple curiosité ; mais ensuite, à cette curiosité succéda de l’intérêt et de l’admiration. Il nous fut facile d’en juger. Le plus grand nombre des visiteurs avaient le chapeau bas et les plus rapprochés saluaient l’Empereur avec respect ; les dames agitaient leur mouchoir. Je vis un canot contenant plusieurs officiers s’approcher assez près et ces officiers ôter leurs chapeaux et faire de profondes salutations. Dans ces moments, si toute cette population eût été maîtresse de la personne de l’Empereur, elle l’eût conduit à Londres en s’attelant à son char comme à celui d’un triomphateur. On peut dire que par sa seule présence, l’Empereur s’était acquis les sympathies du peuple anglais.
Le 28, même spectacle que la veille.
29 et 30. Lord Keith, accompagné d’un sous-secrétaire d’Etat, vint notifier à l’Empereur la décision ministérielle qui le déporte à Sainte-Hélène.
Le 4 août, de bon matin, le Bellérophon appareilla et sortit de la rade de Plymouth et alla croiser dans la Manche, en attendant l’arrivée du Northumberland, vaisseau de 74 désigné pour nous transporter à Sainte-Hélène.
Le 6, vers le milieu du jour, nous mouillâmes dans un endroit nommé Start-Point. Le Northumberland vint mouiller près de nous, ainsi que deux frégates et le vaisseau Le Tonnant, monté par l’amiral Keith. Lord Keith et l’amiral Sir Georges Cockburn vinrent à notre bord ; ils furent reçus par l’Empereur.
Le 7, dans la matinée, l’amiral Cockburn revint à bord et procéda ou fit procéder à la visite de tous les effets de l’Empereur, et de ceux des personnes de sa suite. On saisit à l’Empereur une somme assez importante : on prit toutes les armes que nous avions apportées à bord du Bellérophon. Je ne me rappelle pas si ces Messieurs furent obligés de donner leurs épées, mais on n’exigea pas celle de l’Empereur.
L’opération terminée et le moment étant arrivé de quitter le Bellérophon, l’Empereur descendit dans le canot et alla à bord