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sans qu’on se doutât au dehors du retour de l’Empereur.

Une seule personne était dans la cour où elle se promenait : c’était le duc de Vicence. Il courut au perron pour recevoir l’Empereur, et l’un et l’autre, suivis du Grand-Maréchal, passèrent dans les appartements. Le silence de ces lieux à l’arrivée du maître me serra le cœur.

Dès que l’on connut dans Paris l’arrivée de l’Empereur à l’Elysée, quelques personnes, soit grandes, soit petites, vinrent reprendre leur service ; mais il n’y eut plus comme précédemment, cette multitude d’allants et de venants ; l’Empereur, pour le plus grand nombre, ne fut plus qu’un homme ruiné et que l’on devait par conséquent abandonner. O Napoléon ! que tu as fait d’ingrats ! Mais le peuple, mais tes braves et valeureux soldats, mais de vrais amis te sont restés fidèles et dévoués.

Le 22 juin, l’Empereur abdiqua le pouvoir.


VIII. — DE LA MALMAISON A ROCHEFORT

[L’Empereur se retira à la Malmaison. Saint-Denis l’y rejoignit le lendemain. Il assista et aida aux préparatifs du départ.]


L’Empereur s’étant décidé à partir (29 juin) me fit appeler. Il était environ trois heures et demie. J’avais été désigné pour monter sur le siège. Il me demanda si sa voiture était pourvue de tout ce qui pouvait lui être nécessaire. Sur ma réponse affirmative, il m’ordonna de la faire avancer à une petite porte qu’il me désigna. Cette porte était à la partie de l’aile droite du château faisant face à l’allée qui conduisait à la grande route de Saint-Germain. J’exécutai immédiatement ce qu’il venait de me dire et, quelques moments après, il se rendit à la porte indiquée, accompagné du duc de Rovigo, du Grand-Maréchal et du général Becker. Ce dernier était agent du gouvernement provisoire et, muni des instructions nécessaires pour pourvoir à la sûreté de l’Empereur et, probablement aussi, pour le surveiller dans ses démarches s’il y avait lieu.

La reine Hortense et les autres personnes que j’avais vues dans le salon et qui venaient d’accompagner l’Empereur jusqu’au bas de l’escalier restèrent en dedans sans passer le seuil de la porte jusqu’à ce que la voiture se fût éloignée.

L’Empereur, pour donner le change à tous ceux qui étaient