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vous avez bien profité de la semaine des pivoines, depuis celles qui sont d’un corail vif comme l’aile de l’ibis ou certains coquillages, et ces ponceau dont la pourpre s’effeuille si vite, jusqu’à celles toutes blanches qui sentent violemment le citron et la rose : poignardées d’une tache de sang comme la colombe, et de chair lourde, ou d’un blanc léger, vivant, nuancé, collerette rosée, ébouriffement de duvet... Vous souvient-il de ce matin, retour de bal, où vous avez vu que, dans le très grand vase évasé, leur gerbe étalée mais encore ferme et boutons demi-clos, s’était épanouie largement, plus proche à présent de l’oiseau que de la fleur, et que tout leur bouquet semblait s’être ouvert, impatient, brusque, d’un seul coup, comme votre éventail de plumes ?

Mais, le chèvrefeuille... Le chèvrefeuille !...


PROPOS D’EXPOSITION

— Fragonard. Voilà bien une exposition d’été, aimable, amusante, et si jeune de couleur et de mouvements !

— Il y a là des chefs-d’œuvre...

— Et pourtant on ne s’ennuie pas... Oh ! que cette robe jaune est charmante ! ce jaune aigre et mélodieux semble naitre de l’air de flûte joué par ce musicien galant.

— Madame, c’est le Concert dans le parc...

— Je l’aurais trouvé toute seule... Et voilà Une allée ombreuse...

— Ce n’est pas son nom... C’est celui d’un dessin...

— Je m’en moque, j’irai volontiers me promener là tout l’été...

— Avec moi ?

— Oh non ! les arbres y sont trop beaux. J’irai toute seule, avec un livre et je ne suis même pas sûre de vous inviter à ce goûter sur l’herbe.

— Madame, c’est la Collation à la fontaine.

— Si vous préférez. Pourquoi ce monsieur sans perruque a-t-il l’air de se moquer de moi et me considère-t-il d’un œil si clair, si intelligent et si dédaigneux ?

— Madame, c’est Diderot, — portrait célèbre.

— Ah ! c’est Diderot... Répondez, Diderot ? Je vous suis donc moins sympathique que Mlle Volland ?... Qu’il est vivant ! Il me