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annonciatrice des prochaines hécatombes. Le cœur du vieux chef en est tout remué. « Quelles que pussent être, a-t-il dit, les vicissitudes de la lutte que nous allions entreprendre et que nous savions devoir être très dure, nous nous sentions au cœur une confiance invincible. »

Et tout en remettant ses troupes en main, il prépare l’offensive qui lui est prescrite [1]. En face de lui, il a des forces considérables, beaucoup plus considérables que ne le pense le haut-commandement français : car l’Etat-major allemand a conçu, pour mettre promptement hors de cause les armées françaises, une gigantesque manœuvre d’enveloppement par les deux ailes, et l’effort qu’il prononcera sur sa gauche en vue de s’ouvrir les portes orientales de la France et de couper les artères essentielles du pays n’aura guère moins de puissance et d’ampleur que celui qu’il va tenter sur sa droite. Le général de Castelnau a cinq corps d’armée à sa disposition : le 20e, le 18e, le 9e, le 15e et le 16e. Mais le 13 août, le 18e corps lui sera enlevé, et le 18, ce sera au tour du 9e, alors que la 2e armée est engagée dans une action offensive dont le front est déjà peut-être disproportionné aux effectifs qu’elle possède. D’autre part, ses deux divisions de cavalerie lui ont été retirées et sont immobilisées, par ordre supérieur daté du 14, « en arrière des troupes d’attaque, » en vue d’une exploitation ultérieure d’un succès prématurément escompté. De sorte que lorsque, le 14 août, la 2e armée s’ébranle, elle n’a pas tous les moyens dont elle aurait dû logiquement disposer. A ce moment-Là, les 15e et 16e corps ont reçu l’ordre d’appuyer à sa gauche le mouvement de la 1re armée ; fortement installé en avant du Grand Couronné, le 20e corps formera charnière, tandis que le 9e corps, qui fait encore provisoirement partie de la 2e armée, est mis en réserve pour parer aux contre-attaques éventuelles débouchant de Metz.

Les 14, 15 et 16 août, les 15e et 16e corps se portent en avant vers la Garde et vers Maizières, livrant des combats locaux aux arrière-gardes ennemies, rencontrant çà et là, à Moncourt notamment, une résistance assez sérieuse. Ces premiers engagements laissent apparaître d’inévitables défectuosités auxquelles

  1. Le 13 août, le général de Castelnau recevait l’ordre définitif d’appuyer et de couvrir l’attaque de la 1re armée sur Sarrebourg, en prenant l’offensive dans la direction générale de Faulquemont » tout en assurant l’occupation et la défense du Grand Cuuronné de Nancy.